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Une statue et non un monument

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Une statue et non un monument
Le débat sur le soit-disant monument de la renaissance africaine s'est enlisé dans un dialogue de sourds consécutif à une fausse qualification de ce qui est érigé sur cette mamelle de Ouakam. Le président de la République l'a qualifié de monument et tout le monde répète la même chose. Mais qu'en est-il exactement ? Pour le savoir, nous devons nous efforcer de bien qualifier les choses.

Un monument, c'est un ouvrage d'architecture, de sculpture. Un édifice, bâtiment, obélisque, tour, etc., remarquable par son intérêt, digne de durer et destiné à perpétuer le souvenir de quelqu'un, de quelque chose. Il n'est pas banni par l'Islam s'il n'est pas adoré, vénéré. Mais ce qui est érigé à Ouakam, n'est ni un bâtiment, ni un obélisque, encore moins une tour. C'est plutôt un ouvrage représentant en entier des êtres vivants, un homme qui tient sur le biceps de son bras gauche un enfant et suivi d'une femme. Donc c'est bien une statue qui est dressée sur cette mamelle et non un monument.

Raison pour laquelle il y a cette levée de boucliers des islamistes, des intégristes musulmans, dont la religion interdit et condamne fermement l'érection de statue qu'on adore ou qu'on n'adore pas. Voilà ce que le coran en dit : Si la statue est adorée, si elle fait l'objet de prosternation, cela suppose qu'on la considère comme Dieu, qu'on la substitue au seul Dieu qui existe, le tout puissant. C'est un péché mortel. Si la statue n'est pas adorée, fait ou non l'objet de curiosité, c'est encore un péché mortel dans la mesure où son sculpteur et son commanditaire, s'il en existe, se prennent pour des créateurs d'êtres humains qui se mesurent au créateur du ciel et de la terre, Allah. Dans l'au-delà, le véritable et le seul créateur qu'est Dieu le tout puissant leur intimera l'ordre d'attribuer une âme au personnage symbolisé par leur statue.

Mais si les islamistes et les intégristes musulmans sont dans leur rôle, dans leur devoir, en condamnant et en combattant, au nom de l'islam, cette statue, force est de reconnaître que rien, par contre, n'interdit le président de la République d'ériger des statues, même pour les adorer. Nous sommes dans une république laïque, démocratique et sociale, article premier de notre Constitution que la quasi-totalité des détracteurs islamistes du président avaient votée lors du référendum du 7 janvier 2001. Nous ne sommes pas en république islamique régie par le Coran et la Charria. La Loi fondamentale qui organise notre société, n'interdit aucunement l'érection de statues ou de monuments même si c'est pour les adorer, les vénérer.

Les islamistes et les intégristes musulmans de notre pays doivent se rendre à l'évidence. Savoir que leur combat pour faire triompher leur vision du monde n'est pas parcellaire, il n'est ni ordinaire ni simple. Ils doivent se battre sur le plan politique pour conquérir le pouvoir d'Etat, c'est en ce moment seulement qu'ils pourront, par des lois et décrets islamiques, concrétiser leur vision religieuse d'une société régie par le Coran. Dans l'attente de cette échéance, le Sénégal est régi actuellement par la Constitution du 22 janvier 2001 qui n'est ni religieuse, encore moins de religion musulmane.

Mais les islamistes et les intégristes musulmans ne sont pas les seuls pourfendeurs du président de la République à propos de sa statue. D'autres, très nombreux et dans divers segments de la société sénégalaise, le sont sur plusieurs plans, à savoir :

- Sur le plan esthétique : la statue n'a rien de beau, rien d'esthétique, elle n'est pas agréable à voir parce que comportant plusieurs aspects non conformes à la culture africaine.

- Sur le plan morphologique : le couple et leur enfant n'ont aucune apparence africaine. Ils ressemblent beaucoup plus à des Asiatiques, notamment des Mongoles, qu'à des Africains. Ils ne peuvent pas illustrer la renaissance africaine.

- Sur le plan financier : c'est là que le bât blesse, c'est là où ça fait vraiment mal. Le coût de la réalisation de cette statue qui n'est ni en argent ni en or, est trop onéreux pour un pays sous-développé comme le nôtre. Avec les 14 milliards qu'a coûté la statue, on aurait pu poser beaucoup d'actes de développement dans les domaines des infrastructures, sanitaire, éducation, énergie, assainissement (Saint-Louis première capitale du Sénégal, ancienne capitale de l'Aof, classée patrimoine mondial, a besoin justement de 14 milliards pour son assainissement complet), etc.

Au final, la réalisation de cette statue n'était ni opportune ni urgente ni prioritaire par rapport aux exigences de la demande sociale. Avec cette statue de la Renaissance africaine, qui est en réalité la statue de la discorde nationale, le président de la République est en corrida avec la quasi-totalité des fidèles de la religion dominante de notre pays, laquelle religion combat énergiquement cette statue, et les dégâts collatéraux de cette passe d'armes ont meurtri la communauté catholique qui a protesté par sa voix la plus élevée, le Cardinal Sarr.

Mais il est encore possible pour le président de la République de rectifier, de re-normaliser ses rapports avec la communauté musulmane. Dans la mesure où ce qu'on appelle le monument de la Renaissance africaine et qui est apparemment une statue, est objectivement à la fois une statue et un monument. La statue qui est la partie visible de l'iceberg, n'est qu'un revêtement en cuivre qui enveloppe effectivement l'autre partie invisible de l'iceberg qu'est le monument. Donc, pour en finir avec le débat sur le monument de la Renaissance africaine, et avoir réellement un monument de la Renaissance africaine et non une statue (les mots ont leur signification), le président de la République doit donner ordre de dévêtir le monument de la statue très contestée qui l'enveloppe. Ce faisant, il va maintenir le monument qui ne fera plus objet de contestation, car un monument comme le monument de l'indépendance, comme les monuments aux morts s'il n'est pas adoré, vénéré, n'est pas condamné par l'Islam, ce qui n'est pas le cas d'une statue. En conséquence, j'invite le président de la République à s'engager résolument dans cette direction par souci d'apaisement et de partage de son monument de la Renaissance africaine avec d'abord son propre peuple, ensuite le peuple d'Afrique et de la diaspora africaine du monde.

Moustapha FALL ‘CHE’ Secrétaire général Action patriotique de libération (Apl)




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