Situation des agressions sexuelles à Dakar : 96 % des victimes sont des adolescentes résidant dans la banlieue

Le 30 avril dernier, la Cour suprême a consacré une journée de réflexion sur le phénomène des agressions sexuelles. A l'occasion, médecins et magistrats sont intervenus pour donner leur point de vue sur ce phénomène d'une brûlante actualité.

Entre le 1er janvier 2003 et le 31 mai 2005, le Pr Jean Charles Moreau, chef du service de clinique gynécologique et obstétricale du Chu de Le Dantec a fait une étude prospective portant sur 55 patientes admises dans son service pour ‘suspicion d'abus sexuel’. Il ressort de cette étude du service du gynécologue Jean Charles Moreau que 20 % des cas étaient référés avec une réquisition judiciaire. ‘Le profil épidémiologique de la victime était celui d'une adolescente âgée en moyenne de 14 ans dans 96,5 % des cas et résidant dans la banlieue dakaroise’, lit-on dans cette étude. La même source indique que ‘le profil de l'agresseur était celui d'un homme de 32 ans, appartenant à l'entourage de la victime dans 70 % des cas’. Le mis en cause dans le viol est, souvent, le guide spirituel, le colocataire ou l'ami de la famille. Le mode d'abus sexuel est un contact génito-génital dans 67,3 % des cas et sans protection dans 94,6 %. Aussi sur le plan clinique, 70,9 % des patientes présentaient des signes de traumatisme génital récent et 54,5 % des lésions hyménéales étaient anciennes. Pis, la sérologie Vih était revenue positive dans deux cas. Au cours du suivi, trois grossesses étaient survenues et seules 9,1 % des victimes avaient pu bénéficier d'une assistance psychologique.

En dépit de ces chiffres alarmants, le Pr Moreau qui exposait sur le ‘profil épidémiologique et la prise en charge des victimes d'abus sexuels’, a déclaré que les agressions sexuelles étaient sous-déclarées. A sa suite, le médecin-psychiatre Mamadou Habib Sy du centre hospitalier universitaire de Fann a présenté le thème intitulé ‘Evaluation et suivi psychiatrique des victimes et auteurs d'agressions’. A l'entame de son exposé, il a défini l'agression sexuelle comme ‘un geste à caractère sexuel, avec ou sans contact physique, commis par un individu sans le consentement de la personne visée ou, dans certains cas, notamment pour les enfants, par une manipulation affective ou par du chantage’. Du fait des séquelles que laisse l'agression, il a proposé une assistance psychologique immédiate aux victimes ainsi qu'une coordination entre les services de soins et d'accueil afin d'allier la thérapie et un accompagnement de qualité. Pour sa part, Samba Faye conseiller technique au ministère de la Justice a abordé les aspects juridiques liés aux agressions sexuelles. Après avoir fait ressortir les divers aspects juridiques de la question, M. Faye a relevé l'absence totale, dans le Code pénal qui organise la réponse judiciaire, de mesures de suivi et de traitement des auteurs d'agression sexuelle. De même que des mesures d'assistance matérielle, médicale et psychologique au profit des victimes.