La grande mosquée de Dakar est au cœur d’une polémique autour du Centre commercial El Hadji Maodo Sylla construit sur les réserves foncières faisant face à l’avenue Faidherbe. Une affaire de gros sous dans laquelle l’une des parties - des locataires de cantines et des membres de la direction du lieu de culte - accuse le Secrétaire général de la Grande mosquée, El Hadji Oumar Diène, par ailleurs gérant du centre commercial, d’avoir fait main basse sur une somme de 100 millions de F Cfa, fruit de la vente des cantines. Le gérant du Centre commercial, Secrétaire général de la Grande mosquée, soupçonne pour sa part ses contempteurs de vouloir récupérer le projet devenu rentable.
Tout est parti des agissements d’un certain Abdou Ndiaye, qui est un locataire de ce marché, mais qui se considère comme un partenaire dans l’exécution du projet, explique El Hadji Oumar Diène, le gérant du Centre commercial El Hadji Maodo Sylla, par ailleurs Secrétaire général de la Grande mosquée de Dakar. Selon lui, c’est cet Abdou Ndiaye qui s’est présenté aux commerçants occupant les lieux pour leur signifier que «l’imam Aliou Moussa Samb leur demande de ne plus payer le loyer», au motif que le Secrétaire général de la Grande mosquée et gérant du marché a reçu sur chaque fondement de cantine la somme de 1 million de F Cfa. Ce qui fait un total de 100 millions de F Cfa. Une information faisant croire aux dirigeants de la Grande mosquée que le promoteur et le gérant sont en train de se faire beaucoup d’argent dans cette affaire en ne reversant que 20% des entrées financières provenant de la location de l’ensemble des cantines du centre commercial.
Le Secrétaire général de la Grande mosquée dément avoir perçu 100 millions
Suffisant pour que de puissants lobbies s’activent pour travailler l’oreille de l’Imam afin que le Secrétaire général, El Hadji Oumar Diène, soit défénestré de son poste de gérant du centre commercial et que la structure devienne le patrimoine de la Grande mosquée, au détriment du promoteur, Amadou Ly.
Interpellé sur cette affaire de 100 millions de Cfa, le Secrétaire général de la Grande mosquée et gérant du centre, exhibant ses preuves, déclare que «ce sont les locataires ayant refusé de s’acquitter de leurs loyers, suite aux instructions que le sieur Abdou Ndiaye aurait reçues de l’Imam Aliou Moussa Samb, qui se sont joints à cet homme (ndlr : le locataire) pour exhiber des copies de chèques et dire que j’ai vendu des cantines pour une valeur cumulée de 100 millions de F Cfa».
D’ailleurs, «tous ceux qui refusent de payer, y compris cet Abdou Ndiaye qui traîne plus de 7 mois d’arriérés, ont été assignés en justice et l’affaire est pendante devant le juge», révèle-t-il. En réalité, explique M. Diène, «ceux qui s’agitent veulent récupérer l’affaire qu’ils croient aussi juteuse». Les chèques en question à la main, M. Diène précise : «Il s’agit en fait des copies rassemblées des chèques de paiement des différents locataires, dont le montant total ne dépasse même pas 7 millions de F Cfa que j’ai reversés dans les caisses de la structure de gestion du centre commercial. Le promoteur Amadou Ly m’est témoin». Très remonté de ces accusations, le Secrétaire général de la Grande mosquée signale que «c’est grâce à la mise en œuvre de ce projet et au mode de répartition des retombées financières que la Grande mosquée ne fait plus dans la mendicité pour résoudre ses difficultés de fonctionnement».
Le promoteur parle d’«un coup d’Etat en préméditation»
Faisant l’historique du projet qui a abouti à l’ouverture du Centre commercial El Hadji Maodo Sylla, le promoteur Amadou Ly, que nous avons interrogé, parle d’«un coup d’Etat en préméditation». Avertissant que personne ne pourrait lui prendre le centre commercial, Amadou Ly n’hésite pas à exhiber le bail par lequel le site lui a été cédé, après enregistrement du dossier N°0814/Ct à la Direction des impôts et domaines ainsi que l’autorisation de construction que lui a délivrée la ville de Dakar le 12 décembre 2002 sous le N°004859. Indiquant que ledit bail a été dûment signé par El Hadji Oumar Guèye, président du Comité de gestion de la Grande mosquée de Dakar, le promoteur redoute une remise en cause de l’engagement des dirigeants du lieu de culte. Ce qui pourrait déteindre sur ses relations avec ses banquiers, au sujet de la réalisation de la dernière phase du projet. Selon Amadou Ly, une telle remise en cause va non seulement ruiner ses projets futurs, mais elle compromettrait gravement le processus de désencombrement de Dakar-Plateau, de création d’emplois et d’élimination de la quête destinée à alimenter les caisses de la Grande mosquée.
Le promoteur soupçonne que toutes ces agitations ne visent que l’augmentation du loyer qui, pourtant, a été fixé de manière sociale à 50 000 F Cfa par mois pour une durée de 10 ans. D’ailleurs, signale le promoteur, «ce centre commercial a permis à beaucoup de personnes de se faire de l’argent». Il explique que certains acquéreurs ont vendu «à 10 ou 15 millions leurs cantines» ou les ont louées aux Chinois moyennant 350 000 F Cfa, «au moment où les tenants du projet leur offrent la location entre 50 000 et 75 000 F Cfa». D’ailleurs, El Hadji Oumar Diène, le Secrétaire général de la Grande mosquée, révèle que le sieur Abdou Ndiaye a eu à lui faire la proposition en ces termes : «Augmentons le loyer et faisons un deal sur cette Affaire».
ALIOUNE MOUSSA SAMBA, IMAM RATIB DE LA GRANDE MOSQUÉE DE DAKAR : «Je ne suis mêlé ni de près ni de loin à cette affaire»
Cité dans l'affaire du Centre commercial El Hadj Maodo Sylla, Alioune Moussa Samba, Imam ratib de la Grande mosquée de Dakar, n'en garde pas moins sa lucidité. Mieux, il se veut formel : «Je ne suis mêlé ni de près ni de loin à cette affaire».
Dans un langage imagé, avec à l'appui des versets du Coran, Alioune Moussa Samba, que nous avons rencontré, hier, n'a pas voulu alimenter la polémique. D'autant plus qu'il assure n'avoir rien à se reprocher dans cette rocambolesque affaire qui n'a pas fini de livrer tous ses secrets. Toutefois, sur notre insistance, l'Imam ratib de la Grande mosquée de Dakar daigne lâcher : «Je suis celui qui souffre le plus dans cette affaire, parce qu'elle se déroule dans une mosquée. Je suis blanc comme neige. Je n'ai rien à me reprocher, dans la mesure où je ne suis mêlé ni de près ni de loin à cette affaire. Je demande aux uns et aux autres de faire preuve de patience. Car, tôt ou tard, la vérité va finir par éclater au grand jour». Alioune Moussa Samba de promettre de faire tout son possible pour que ce problème soit réglé dans les plus brefs délais.
Joint au téléphone, Abdou Ndiaye, qui est accusé de tous les péchés d'Israël par Amadou Ly et El Hadji Oumar Diène, respectivement promoteur et gérant du Centre commercial El Hadji Maodo Sylla, n’a pas été prolixe. Il se contente juste de réfuter toutes les accusations portées contre sa personne. À l'en croire, toutes ces accusations sont fausses.
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