Mercredi 24 Avril, 2024 á Dakar
Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Societe

EN PERSPECTIVE - Dakar : Plus répulsive qu’attractive

Single Post
EN PERSPECTIVE - Dakar : Plus répulsive qu’attractive

Trois millions d’habitants à Dakar sur une population de 12 millions de sénégalais. Si cette croissance urbaine est en partie due à l'accroissement démographique naturel, elle est surtout le résultat d'une migration des campagnes en direction des villes. La sécheresse, la dégradation de l'environnement, la pauvreté rurale, sont à l’origine de ce mouvement des campagnes vers Dakar, capitale économique et administrative du Sénégal qui, par la force de ces facteurs aggravant et aggravés par une incurie générale, est devenue un grand souk. Alors qu’une urbanisation peut être contrôlée, à Dakar elle est partout spontanée et anarchique et ne peut que poser d'immenses problèmes de voirie, de transports, de santé, de délinquance, etc… L'organisation (ou la désorganisation) de la ville de Dakar est ainsi le reflet des disparités socio-économiques et de la conception politique.

L'accroissement extrêmement rapide de la population de la région de Dakar, qui est passée de 500 000 habitants en 1967, à près de 3 millions aujourd’hui, représentant plus d'un quart de la population totale, a entraîné une forte occupation de l'espace dans la presqu'île du Cap-Vert ; 0,25% (550 km²) du territoire national. Aussi, une forte pression s'exerce sur les équipements, les infrastructures, les réseaux, les voiries. Les conséquences liées à cette situation sont considérables. Outre la forte pression sur les réserves foncières qui sont en train de s'épuiser de manière considérable, il y a l’accroissement des occupations irrégulières, de zones non-aedificandi, le développement de quartiers irréguliers, les occupations irrégulières et anarchiques des voies et des zones de servitudes.

Cette concentration humaine en relation avec la situation géographique de la presqu'île du Cap-Vert et le maillage du réseau, induit certaines défaillances au niveau du système de transport, qui se trouve dans l'incapacité de satisfaire la demande de déplacements urbains des populations accrue par l'éloignement progressif des zones d'habitat par rapport aux zones de travail.

Les causes de cette situation sont lointaines et récentes. Sécheresse, dégradation de l'environnement, pauvreté rurale, disions-nous. Les politiques agricoles ont également eu des répercussions. Depuis la libéralisation du marché et la réduction dans les années 80 de l'aide du gouvernement, le processus de paupérisation frappant les exploitants agricoles sénégalais s'est accéléré, particulièrement dans le secteur de l'arachide. De ce fait, les jeunes des campagnes ont été encore plus nombreux à partir chercher du travail à Dakar dont la région regroupe 90 % des activités industrielles sénégalaises. Dans ce contexte et partout, l'informel constitue pour la plupart des familles la principale source de revenus, le secteur dit formel affichant l'incapacité à satisfaire la demande sociale. Le marché du travail reste ainsi déprimé à cause de la stagnation du secteur moderne et en dépit de l'importance croissante du secteur informel. Le secteur agricole n'enregistre pas d'amélioration notable compte tenu de sa dépendance et de sa vulnérabilité dont les traits majeurs demeurent son manque de diversification, les limites de sa productivité et sa subordination aux aléas climatiques. Les facteurs qui viennent d'être évoqués montrent qu’une répartition plus équitable des revenus apparaît comme une arlésienne alors que le niveau de vie de la plupart des populations se dégrade.

Aussi, la ville est devenue l'espace de la survie, mais le problème urbain a été aggravé par les politiques économiques que le gouvernement sénégalais, à l’instar d’autres gouvernements africains, a adoptées au cours des années 80 et 90, en grande partie à la demande de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international(Fmi). Les premiers programmes de privatisation ont souvent entraîné une réduction des emplois dans le secteur structuré. De même, la libéralisation des échanges a contribué à la faillite de nombreuses entreprises locales incapables de rivaliser avec les articles importés bon marché. Par ailleurs, l'austérité budgétaire qu'ont entraînée les programmes d'ajustement structurel a empêché les autorités municipales de maintenir et de financer suffisamment les services de base, comme les routes, le ramassage des ordures, l'électricité et les réseaux d'approvisionnement en eau.

Dès lors, la pauvreté est devenue non seulement rurale mais urbaine. Ce qui fait dire d’ailleurs à certains spécialistes que « la pauvreté ne connaît pas de frontières ». Mais puisque la population se concentre de plus en plus dans les villes comme Dakar pour le cas d’espèce, la pauvreté augmente de façon beaucoup plus marquée et la situation s’est dégradée à tel point que le schéma urbain se modifie considérablement.

L’on peut alors parler de « ville illégale » constituée de quartiers d'habitat populaire avec une propension à s'étaler considérablement et anarchiquement sur les terrains non parcellisés. La ville illégale reçoit ainsi la grande majorité des citadins rejetés de la ville moderne ; ces derniers construisent sur des espaces "illégaux" négociés auprès d'intermédiaires urbains ou auprès des chefs coutumiers des villages de la périphérie urbaine ; cet habitat autoproduit permet de résoudre partiellement la crise du logement non maîtrisée par les pouvoirs publics et montre la capacité des sénégalais à gérer la précarité. Le processus d'extension urbaine inégalement contrôlé est surtout dynamique au nord-est de l'agglomération dakaroise, à Dakar-Pikine.
Les conséquences négatives de la croissance urbaine de Dakar (pollution, nuisances, exiguïté et rareté de l'espace, insécurité grandissante) font que, même si en principe le pouvoir attractif de la ville est considérable, la ville de Dakar devient plus répulsive qu'attractive. C’est la crise. Et la crise « informalise » tout : de l'alimentation aux relations personnelles en passant par l'habit, l'éducation et l'acquisition des biens d'équipement. C'est assurément l'élément structurant majeur de l'économie domestique. La promotion d'un autre projet de développement axé sur une finalité humaine est devenue une exigence fondamentale. Ce sont par conséquent des dispositifs dans l'équilibre global de la société qu'il convient de réhabiliter.



0 Commentaires

Participer à la Discussion

  • Nous vous prions d'etre courtois.
  • N'envoyez pas de message ayant un ton agressif ou insultant.
  • N'envoyez pas de message inutile.
  • Pas de messages répétitifs, ou de hors sujéts.
  • Attaques personnelles. Vous pouvez critiquer une idée, mais pas d'attaques personnelles SVP. Ceci inclut tout message à contenu diffamatoire, vulgaire, violent, ne respectant pas la vie privée, sexuel ou en violation avec la loi. Ces messages seront supprimés.
  • Pas de publicité. Ce forum n'est pas un espace publicitaire gratuit.
  • Pas de majuscules. Tout message inscrit entièrement en majuscule sera supprimé.
Auteur: Commentaire : Poster mon commentaire

Repondre á un commentaire...

Auteur Commentaire : Poster ma reponse

ON EN PARLE

Banner 01

Seneweb Radio

  • RFM Radio
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • SUD FM
    Ecoutez le meilleur de la radio
  • Zik-FM
    Ecoutez le meilleur de la radio

Newsletter Subscribe

Get the Latest Posts & Articles in Your Email