ROME - Sit-in devant l’ambassade du Sénégal : Les Sénégalais d’Italie réclament la vérité

Envoyé en mission à Dakar, le diplomate Babacar Mbaye en service à l’ambassade du Sénégal en Italie se voit confisqué sont passeport. Sa femme et son bébé de trois mois sont dans la plus grande inquiétude. La communauté sénégalaise de Rome interpelle l’ambassadeur et demande des explications.

Les Sénégalais vivant en Italie n’apprécient pas l’attitude des autorités sénégalaises qui ont confisqué à Dakar le passeport de Khalifa Babacar Mbaye, diplomate en fonction à l’ambassade du Sénégal à Rome. Pour le manifester, ils ont organisé un sit-in, mardi dernier, devant les locaux de l’ambassade du Sénégal en Italie. Déjà la veille, ils avaient rencontré l’ambassadeur Cheikh Sadibou Fall pour lui faire part de leurs inquiétudes. Seulement ces émigrés, au bout d’une rencontre qui n’a pas duré plus d’une demi-heure, sont sortis du bureau de l’ambassadeur, plus inquiets de la situation de M. Mbaye et de sa famille laissée en Italie : l’ambassadeur qui déclare avoir appris comme tout le monde que M. Mbaye est bloqué au Sénégal, promet d’envoyer une demande d’informations à ses supérieurs pour en savoir plus.

Selon le président de l’Association des travailleurs sénégalais de Rome, l’ambassadeur doit être plus explicite avec la communauté qu’il est supposé protéger. «L’ambassadeur ne peut pas ignorer les causes qui ont abouti à la confiscation du passeport de M. Mbaye qu’il a lui-même envoyé en mission de deux jours au Sénégal. Nous organisons dès demain (mardi) un sit-in dans les locaux de l’ambassade car notre rencontre avec l’ambassadeur n’a pas réglé la situation», annonce nos interlocuteurs.

En tout cas, son excellence Cheikh Sadibou Fall se limite juste à dire que «quand il (Khalifa Babacar Mbaye) partait pour Dakar, c’était pour une mission de deux jours, c’est par la suite que j’ai appris qu’il est retenu à Dakar. Je ne peux pas demander la raison de la confiscation de son passeport. C’est à lui de demander des explications à son département hiérarchique. La mission qui l’envoie à Dakar vient de Dakar, je n’ai fait qu’exécuter ce qui m’est demandé par l’administration», explique-t-il. «Je suis surpris comme tout le monde après avoir appris la nouvelle, je ne peux vous en dire plus», poursuit M. Fall. Non sans faire un commentaire selon lequel Babacar Mbaye est un fonctionnaire de la police et qu’il est appelé à rejoindre les rangs de la police où il exerçait depuis des années.

Par ailleurs, la délégation de Sénégalais qui ont interpellé l’ambassadeur estime que «la femme de Babacar Mbaye et son bébé doivent être soutenus, ils connaissent rien de la ville donc s’il leur arrive un mal qui vient s’ajouter à leur malheur, ils ne s’en sortiront pas». Jointe au téléphone, Mme Mbaye dit avoir été informée par son mari. Malgré une voix hésitante, elle semble sereine en affirmant : «Je suis bien soutenue par des amis qui viennent me remonter le moral, ce n’est pas facile, mais cela devrait arriver. C’est de son destin, seulement on pourrait l’informer selon les normes administratives.» Toutefois, elle se pose la question de savoir «qui gagne à faire souffrir (son mari) ou sa famille». Aussi ajoute-t-elle que si elle a le soutien des Sénégalais de Rome et du personnel de l’ambassade, «l’ambassadeur ne s’est pas inquiété de ma situation. Il ne m’a ni rendu visite ni appelée», regrette-t-elle.

Pourtant, à l’ambassade, beaucoup de fonctionnaires rencontrés sur place témoignent qu’entre Babacar Mbaye et Cheikh Sadibou Fall, il n’y avait aucune animosité. D’autant qu’ils attestent que M. Mbaye est l’un des conseillers les plus consultés par l’ambassadeur. Il est le chargé des affaires consulaires et par ailleurs deuxième secrétaire à l’ambassade, un poste qu’il occupe depuis son arrivée à Rome en 2002, en remplacement de Abdoulaye Diallo. Non plus, il n’a jamais eu de problème avec le personnel de la représentation diplomatique de Rome, ni avec ses prédécesseurs, indique-t-on. «C’est un collègue vraiment très loyal qui communique avec tout le monde», précise un autre interlocuteur.

Ce qui fait croire à certains qu’en réalité, «c’est peut-être parce qu’il est le beau-frère de Idrissa Seck, qui ne s’entend plus avec le président de la République, qu’il subit, lui aussi, les conséquences du divorce entre l’ex-Premier ministre et Me Wade». Sinon, il aurait pu être rappelé à Dakar selon les normes administratives, comme tout administrateur public. Surtout que «Babacar est à la veille de sa retraite et de l’expiration de sa durée d’affectation en Italie». En effet, Babacar Mbaye dont le passeport diplomatique est confisqué à Dakar, alors qu’il était en mission, est à quatre mois de fin de service à Rome et à six mois de la retraite.