* « Au parti socialiste, j’étais mis à l’étroit »
* « J’ai connu les pires privations, brimades et vexations avec le
Ps »
*« …Pas un seul instant, je n’ai regretté ma proximité avec Wade »
* « Le bilan de Wade c’est un tout, difficile à détailler »
* « La réélection de Wade est un point de la plateforme sociale »
Le nom de Mbaye Jacques se confond à la ville de Rufisque, dont il
a géré pendant dix neuf années la municipalité, avant de la quitter à
la faveur d’une délégation spéciale. Très tôt engagé en politique, le
président de l’association nationale des porteurs de pancartes, revient
avec nostalgie sur les péripéties de notre indépendance. Devenu libéral
entre les deux tours de l’élection présidentielle de 2000, il considère
la fusion entre son parti le PPC et le PDS, comme un mariage de raison.
Dans son nouvel engagement aux côtés du président de la République,
Mbaye Jacques Diop se positionne à l’avant-garde du combat pour
l’émergence du Sénégal. A cœur ouvert, l’actuel président honoraire du
Conseil Economique et Social, s’est livré sans détours au questionnaire
du Messager….
Le Messager : Vous êtes devenu membre de la mouvance
présidentielle depuis la fusion entre le PPC et le PDS. Après dix années
de gestion de l’Etat, comment appréciez-vous votre compagnonnage avec
Wade ?
Me Mbaye Jacques Diop : Je voudrai tout d’abord, apporter une
rectification qui me paraît importante sinon fondamentale. Je suis de
ceux qui accompagnent le président Wade depuis la mise sur pied du
Front pour l’Alternance (FAL). Autrement dit, j’ai commencé à cheminer
avec lui entre le premier et le deuxième tour de l’élection
présidentielle de 2000. J’aime également rappeler que je l’ai rejoint à
un moment incertain, où personne ne savait qui allait remporter le
scrutin entre Wade et Abdou Diouf. Une décennie après, je m’honore
aujourd’hui plus qu’hier d’être parmi ceux qui ont voté et fait voter en
sa faveur en 2000 et 2007.
Le Messager : En tant que président de l’Association Nationale
des Porteurs de Pancartes, quelles sont les mutations qui vous ont
marqué dans votre parcours politique ?
Me Mbaye Jacques Diop : Je suis un ancien responsable du mouvement
des jeunes du BDS de Senghor, celui du BPS, de l’UPS et du PS. Ma
carrière politique a donc commencé pour prendre un évènement daté,
depuis le congrès des jeunes du BDS en 1954 à Louga, à l’issue duquel
j’ai été élu secrétaire à l’organisation.
Le secrétaire général que nous avions élu à l’époque (paix à son
âme), s’appelait Mamadou Alkali Diouf. Nous étions avec d’autres
camarades dont la plupart ne sont plus de ce monde. C’est le cas de mon
ami Mansour Bouna Ndiaye, qui faisait à l’époque office de trésorier
général. Il y a encore Ababacar Mbaye Ndir, Gallo Nguer de Thiès, Lamine
Sarr, un ancien député de Foundiougne, qui étaient tous, plus âgés que
moi. Ce qui veut dire que je me suis très tôt engagé en politique. Après
le congrès du BDS, il y eut entre temps la fusion entre le BDS de
Senghor et l’UDS / RDA d’ Ablaye Guèye « cabri » et de Thierno Bâ. En
1956, Senghor avait réussi à fusionner sa formation politique avec
l’Union Démocratique Sénégalaise section RDA de Houphouët Boigny qui
était un parti plus ou moins communisant ou communiste. Bref un parti de
gauche. Des camarades de grande envergure politique dont le mérite a
été démontré au cours de l’histoire. Avec également l’absorption
d’autres ténors tels
qu’ Abdoulaye Ly, Amadou Makhtar Mbow, Doudou Thiam entre autres.
Cette fusion qui s’est opérée en 1956, a dû donner naissance au Bloc
Populaire Sénégalais (BPS). Donc nous autres jeunes du parti, avions
aussi tenu notre congrès pour aller dans la mouvance de la fusion, ainsi
que d’autres congénères engagés et qui étaient issus de l’ex UDS / RDA.
C’est donc en 1957 à Thiès, que nous avons tenu le congrès des jeunes
du PPS et durant la même année, j’ai été réélu secrétaire à
l’organisation et à la propagande. Amadou Ndéné Ndaw de Kaolack en était
le secrétaire général, Alioune Diop secrétaire général adjoint, Amadou
Racine Ndiaye de Dakar, le trésorier général, Sanor Diouck de Thiès, le
secrétaire administratif, Atoumane Ndiaye de Rufisque, secrétaire
administratif adjoint. Je m’arrête là pour vous dire que les statuts du
parti de l’époque disaient de manière claire que : « en congrès, les
jeunes élisent trois membres qui devaient les représenter au bureau
politique du PPS ». En Janvier 1958 à Dakar, une autre fusion s’opère
entre le BPS de Senghor, Mamadou Dia, Ablaye Guèye, Ablaye Ly et le
Parti Sénégalais d’Action Socialiste (PSAS) de Lamine Guèye, avec ce que
l’on appelait à l’époque les socialistes unitaires incarnés par
Abdoulaye Fofana et Obèye Diop entre autres. C’est cette fusion qui a
été à l’origine de l’UPS. Alors, les jeunes ont à nouveau conduit leur
délégation pour se faire représenter au sein du bureau politique de
cette nouvelle formation. Nous avons ainsi été reconduits Ndéné Ndao,
Racine Ndiaye et moi-même, plus maintenant la direction des jeunes issus
du PSAS de Lamine Guèye, avec Amadou Makhtar Diop de Rufisque et du
MSUS de Ousmane Socé Diop, avec Maguette Birama Sarr. Nous étions donc
cinq à représenter les jeunes à la direction de l’UPS et le 13 Mai 1958,
les évènements d’Alger ont éclaté, occasionnant le retour du Général De
Gaulle au pouvoir. En Juin et Juillet de la même période, l’UPS en tant
que parti politique majoritaire au Sénégal, unique et unifié avec
d’autres formations politiques des territoires d’outre mer comme le
Niger, la Guinée, le Soudan Français, le Tchad, le Dahomey etc, tiennent
un congrès continental à Cotonou. C’était dans le cadre d’un courant
supra national dénommé PRA, qui était quelque part une réplique du
Rassemblement Démocratique Africain de Houphouët Boigny. C'est-à-dire
que Senghor et ceux qui pensaient comme lui, ont créé le Parti du
Regroupement Africain, avant de convoquer le congrès du PRA à Cotonou
les 25, 26 et 27 Juillet 1958 et auquel j’ai eu la chance de prendre
part, alors que j’avais vingt deux (22) ans, à côté de tous les grands
leaders qui n’étaient pas de la mouvance de Houphouët. Je peux citer
dans l’ordre Bacary Djibo du Niger ; Fily Dabo Cissokho du Soudan ;
Barry 3 et Barry Diawandou de la Guinée ; Hubert Maga de l’ancien
Dahomey devenu le Bénin ; Gabriel Lisette du Tchad etc. Tous ces grands
noms dont la plupart étaient des députés et conseillers de l’Union
Française, ont tenu ce congrès sous la houlette de Léopold Sédar
Senghor.
Le Messager : Alors, quel rôle avez-vous joué dans l’avènement de
notre indépendance ?
Me Mbaye Jacques Diop : Durant la même période de Juillet 1958, il
y avait un bouillonnement intellectuel et politique intense et pour
nous autres, le moment était venu d’aller vers l’indépendance. Déjà au
congrès de 1957 à Thiès, notamment celui de l’Union des Jeunes du PPS,
nous avions posé la question de l’indépendance et là j’ouvre une
parenthèse pour vous signaler qu’en Juillet 1957, le Parti Africain de
l’Indépendance (PAI), naissait aussi à Thiès avec le même mot d’ordre
que nous : l’accession du Sénégal à la souveraineté internationale. Mais
nous avions été freinés dans notre élan par nos anciens, dont Abdoulaye
Ly et Ablaye Guèye, dépêchés à notre congrès pour nous demander
d’attendre que la direction du parti se prononce pour adopter une telle
position. Pour revenir au congrès de Cotonou, retenez que trois mots
d’ordre avaient été lancés. Il s’agissait de : l’indépendance immédiate ;
la formation d’une nation fédérale Africaine et une confédération
multinationale avec les peuples libres et égaux. Au mois d’Août 1958, le
Général De Gaulle, entame son périple Africain par Madagascar, puis au
Congo Brazzaville, ensuite en Côte d’Ivoire et en Guinée Conakry, avant
d’atterrir à Dakar le 26 du même mois. Je vous signale qu’auparavant, il
avait été partout bien accueilli par les populations sauf en Guinée, où
le président Sékou Touré s’était radicalisé. Un mois exactement après
la tenue de notre congrès, comme j’étais le secrétaire à l’organisation
des jeunes et à la propagande, j’étais également le maître d’œuvre de
cet accueil à la fois historique et responsable, de De Gaulle à Dakar.
Ceci, après deux réunions de bureau politique tenus à cet effet, pour
affûter notre stratégie en faisant confectionner nos banderoles et
pancartes, sur lesquelles étaient bien inscrits les mots d’ordre de
Cotonou afin de lui souhaiter la « bienvenue » à notre manière.
Valdiodio Ndiaye, qui devait prononcer son discours, est venu nous voir
le 25 dans l’après midi, accompagné de Jean Collin et
d’ Abdoulaye Ly, pour nous donner la primeur de son discours.
Voilà des faits vérifiables auprès des témoins vivants et c’est pourquoi
il ne faudrait pas insulter l’histoire. Les jeunes de l’UPS étaient
plus nombreux que tous les autres au niveau des sections. Nous avions
quadrillé Dakar en quatre secteurs avec à leur tête des chefs tels que
Nguirane Ndoye ; Serigne Babacar Diop ; Mame Ciré Thiam, pendant que je
m’occupais du Plateau, précisément la place Protêt (actuelle place de
l’indépendance). Là où devait se tenir la rencontre avec le Général De
Gaulle, parce que j’étais le plus responsable. Nous avons fait ce que
nous avions jugé normal de faire. De Gaulle s’en est allé avec l’ancien
gouverneur de l’AOF, devenu ministre de la France d’outre mer, qui était
de sa délégation, non sans lui intimer l’ordre de rester à Dakar le
temps qu’il faudra pour régler le problème de notre pays. Parce qu’il
n’était pas question pour lui que la colonie du Sénégal bascule vers le «
Non ». A la place Protêt, il y avait certes quelques éléments du PAI,
mais les photos et autres images d’archives montrent à 99 %, les
pancartes des jeunes de l’UPS et quelques pancartes du Mouvement
Populaire Sénégalais (MPS) de Doudou Guèye. Il y avait aussi quelques
étudiants de l’Union Générale des Etudiants de l’Afrique Occidentale
(UGEAO) et d’autres camarades rentrés de la France pour passer leurs
vacances. Et il faut le dire, car à l’époque le PAI ne comptait pas
trois cent (300) membres, même si on peut reconnaître le mérite de
Majmouth Diop, qui a su au moment où le Sénégal n’était pas encore
structuré, accompagner la dynamique d’indépendance avec son fameux «
Moom Sa reew », là où nous autres scandions le slogan « Joot Sa reew ».
Les 26 et 27 Août, tout ce que le Sénégal comptait comme forces
féodales, notamment les chefs de canton, chefs coutumiers et religieux
se sont mobilisés, manipulés qu’ils étaient pour faire voter « Oui ».
Mieux, nos parents Lébous avaient même accepté que le Cap Vert devienne
un département Français au cas où la majorité voterait en faveur de
l’indépendance. En ce moment, il y eut une tension ambiante extrême dans
notre pays du fait des positions divergentes que la convocation de tous
les chefs de canton à Dakar à la veille du référendum, recouvre encore
de tout son mystère. Mamadou Dia et Senghor qui s’étaient absentés,
reviennent de leurs vacances et commencent à réunir les instances de
l’UPS section Sénégalaise du PRA, pour leur demander est-ce qu’il
faudrait se conformer au mot d’ordre de Cotonou ou non. Je dois signaler
aussi que nous avions toutes les difficultés du monde à trouver un
accord, malgré les multiples réunions du comité exécutif qui se tenaient
à la salle des fêtes de Rufisque. Des réunions qui tiraient en longueur
jusqu’au petit matin, sans que nous puissions réellement trouver un
terrain d’entente. Mamadou Dia était donc à la tête d’une délégation
envoyée à Conakry pour s’enquérir de l’état de la situation auprès du
président Sékou Touré, tandis qu’une autre délégation conduite par feu
Diaraf Diouf, était dépêchée chez Bacary Djibo du Niger. Après leur
retour, la situation perdurait toujours dans le statu quo, alors que
nous ne voulions pas que les partisans du « Non » soient
systématiquement mis en minorité. C’est à ce moment là, que nous sommes
allés chez Amadou Gabin Guèye à Rufisque, pour mettre sur pied le PRA /
Sénégal et signer le manifeste du 20 Août 1958. Il s’agissait pour nous
signataires de rester fidèles au mot d’ordre de Cotonou. Une semaine
après, c'est-à-dire le 28 Septembre, c’était le vote et nous n’avions ni
moyens, ni assez de temps pour battre campagne, alors que les forces
féodales étaient déjà « préparées » pour le « Oui ». C’est pourquoi,
nous n’avons pas pu faire comme la Guinée, qui a pratiquement arraché sa
souveraineté. C’est ce qui a fait qu’ également, nous n’avons pas eu la
même situation que Bacary Djibo au Niger qui, malgré le fait qu’il ait
fait voter « Non », a été battu par les forces féodales de son pays.
Lesquelles ont installé juste après Hamani Diori. C’est ce qui
expliquait aussi l’hésitation de Senghor et Mamadou Dia, qui ont
finalement pris la pleine mesure de la situation pour voter « Oui ».
Toutefois, nos efforts n’ont pas été vains, car quelques temps après, le
Général De Gaulle est revenu à Dakar et Saint Louis, où il fera face à
une pression telle qu’il ne pouvait plus résister devant notre volonté
ferme d’aller à l’indépendance. Je rappelle au passage que dès 1959, le
Sénégal et le Soudan s’étaient déjà réunis dans la fédération du Mali
grâce aux porteurs de pancartes.
Le Messager : Quelle comparaison faites-vous des trois chefs
d’Etat Sénégalais que vous avez eu l’honneur de côtoyer ?
Me Mbaye Jacques Diop : Vous savez, le Sénégal a aujourd’hui
cinquante ans. Cela veut dire qu’Abdoulaye Wade a fait dix ans à côté
des quarante années que se partagent équitablement Senghor et Abdou
Diouf, auxquels je rends hommage. A chacun d’entre eux, je crois que le
Sénégal lui est redevable. Senghor a fait de sorte que nous ayons une
nation rassemblée, vivant en parfaite harmonie, sans aucune
considération de race, d’ethnie ou de religion. Il a aussi ouvert les
voies de la démocratie. Une petite anecdote et clin d’œil au président
Wade : en 1974, j’étais le secrétaire permanent de l’UPS, et directeur
de l’école des cadres du parti socialiste. Quand en 1978, le PDS a fait
sa percée électorale avec dix huit (18) députés élus à l’Assemblée
Nationale, c’est moi qui avais rédigé le communiqué du bureau politique
du parti socialiste. Ce jour là, nous avons chanté la maturité de notre
démocratie parce qu’ayant accepté le pluralisme jusqu’au parlement. Je
dois affirmer que les dix huit députés du PDS représentaient un symbole
fort dans l’Afrique de l’époque, où aucun pays n’osait faire une telle
aventure. Aujourd’hui, nous devons cette performance démocratique aussi
bien à Senghor qu’à Me Wade. Abdou Diouf est venu après pour permettre
au Sénégal d’instaurer une bonne administration, sans laquelle il ne
peut y avoir un état républicain. Senghor et Abdoulaye Wade sont de
grands hommes politiques et Abdou Diouf un haut fonctionnaire avec
chacun son style.
Le Messager : L’an 10 de l’alternance a été récemment célébré,
comment jugez-vous le bilan à mi-parcours du président Wade ?
Me Mbaye Jacques Diop : Le président Wade a beaucoup fait, même si
la réalité objective est qu’un pays ne peut se construire en dix ans.
J’avoue également que son bilan est un tout. Car aussi bien dans le
secteur de l’agriculture avec la GOANA, cet ambitieux programme qui est
parti pour régler la question de la souveraineté alimentaire et du monde
paysan ; Il y a les infrastructures, la pêche, le tourisme, la santé,
toute comme l’éducation, qui a connu des avancées significatives depuis
le début de l’alternance. Vous savez, les actes ont plus d’écho que les
discours. C’est pourquoi, nous voulons le réélire en 2012, afin qu’il
continue dans cette voie pour pouvoir réaliser ses nobles ambitions pour
notre pays. Néanmoins, il y a deux secteurs clés qui continuent d’être
des préoccupations pour les Sénégalais et auxquels je voudrai qu’il
mette davantage l’accent. C’est le cas de l’énergie, dont la
distribution devrait être permanente partout au Sénégal, dans les
centres urbains, comme dans les campagnes. Il faut ensuite trouver des
solutions adéquates au chômage des jeunes. Cet aspect de la demande
sociale me paraît fondamental à bien des égards, car dans mon quartier
natal de Rufisque, le phénomène a atteint des proportions inquiétantes
et laissé la place aux femmes, qui entretiennent aujourd’hui les
ménages. Je pense que ce sont ces grands défis que nous devons
aujourd’hui relever avec le président Wade, en termes de formation et de
qualification professionnelle des jeunes, pour leur compétitivité sur
le marché du travail et ensuite la souveraineté totale en matière
alimentaire.
Le Messager : Pourquoi vous ne ratez jamais l’occasion de
rappeler que l’on vous qualifie à tort de transhumant ?
Me Mbaye Jacques Diop : Vous savez en 2000, j’avais activement
contribué à l’élection du président Wade qui m’avait demandé par la
suite d’intégrer le PDS. C’était au mois d’Avril 2000 à l’hôtel
Méridien. Avec le soutien d’Awa Diop, la présidente nationale des femmes
libérales, j’ai demandé au président de me laisser d’abord créer mon
parti. Au vu de mon parcours, il était nécessaire pour moi que je sache
comment les Sénégalais me regardaient et Awa Diop a dû appuyer cette
requête auprès du président Wade. En vérité, le secrétaire général
national du PDS voulait me mettre dans la direction du parti, d’autant
plus que l’on s’acheminait vers des élections législatives. Alors il
m’avait promis deux postes en situation éligible et deux autres postes
en situation plus ou moins éligible. Des positions assez généreuses,
mais grâce à Dieu, j’ai pu le convaincre pour mettre d’abord sur pied ma
propre formation politique : le Parti pour le Progrès et la Citoyenneté
(PPC), qui avait participé aux législatives avec vingt quatre (24)
autres partis et coalitions de partis qui étaient en lice. A l’issue du
scrutin, c’est la coalition sopi qui est arrivée en tête, suivie du
parti socialiste et de l’Afp de Niasse, ensuite est venue l’Urd de Djibo
Kâ et Aj / Pads, au moment où le Ppc occupait la sixième position. Un
parti qui n’avait même pas un an d’existence venait de damer le pion à
des formations qui étaient là depuis plus de vingt ans, dont le Pit d’
Amath Dansokho, avec qui d’ailleurs je ne boxe pas dans le même ring.
Mais le président de la République, ne s’est pas découragé, car après
avoir créé le PPC et jaugé mon poids politique, Wade est revenu à la
charge pour m’exprimer son souhait de voir mon parti fusionner en
premier avec le PDS. Idrissa Seck qui était le numéro 2, Macky Sall et
Modou Diagne Fada étaient présents en tant que plénipotentiaires du
parti libéral pour rencontrer mon collaborateur Seydou Diouf dans le
cadre de ces négociations. Un protocole de fusion a été donc conclu et
je signale que c’est la seule fusion qui, jusque là a fait l’objet d’un
congrès tenu au CICES le 20 Avril 2002. Dans ledit protocole, il était
question qu’une bonne portion des anciens membres du bureau politique du
PPC intègre le comité directeur du PDS. Que les anciens membres du
comité exécutif entrent également dans cette instance ainsi que
l’intégration des militants à la base. Ce qui n’a pas été fait mais pour
autant, nous poursuivons le compagnonnage en toute discipline. De 2000 à
2004 donc, je suis resté député de mon parti et maire de ma ville de
Rufisque, avant que le président de la République ne se décide à me
nommer président du Conseil de la République pour les Affaires
Economiques et Sociales (CRAES). Comme dans la vie des hommes,
quelquefois il peut y avoir des incompréhensions, mais le dépassement a
permis de tourner cette page.
Le Messager : Comment se fait-il que certains chefs de parti de
la mouvance présidentielle qui n’ont même pas fusionné avec le PDS
soient mieux lotis ?
Me Mbaye Jacques Diop : Ces partis qui n’ont pas fusionné et qui
sont des alliés tout en conservant leur autonomie d’action, leurs
organes et leurs instances, leurs hommes, leurs femmes et leurs jeunes
sont malheureusement mieux lotis que nous. Là, où les autres partis qui
n’ont pas accepté la fusion sont présents dans le gouvernement avec au
moins un ministre, ou ministre d’Etat à côté de députés et sénateurs
qu’ils ont au parlement ou bien encore des directeurs généraux, Pca et
ambassadeurs sur le quota du PDS. A part moi-même, il n’y a que Seydou
Diouf, qui a été promu député avant qu’il ne devienne le rapporteur
général de l’Assemble Nationale, ainsi que Yatma Fall, nommé conseiller
économique et social en sa qualité de président des handicapés, mais pas
en tant que responsable de l’ex PPC et enfin Ngoné Ndoye. Vous savez,
avoir son propre parti et être autonome en inondant les médias de
communiqués n’est pas comparable au fait de se fondre dans un parti et
se conformer à sa ligne de conduite. Il me paraît qu’il y a là un
questionnement on ne peut plus préoccupant. C’est pourquoi le président
de la République devrait revoir tout cela. Il s’agit de chercher à
savoir est-ce qu’il faut mieux traiter les partis qui ont eu une
représentativité à l’Assemblée, moins que les partis qui sont des alliés
et qui ont refusé de fusionner avec la majorité. Hormis l’URD de Djibo
Kâ, qui a participé à des élections, nul ne peut dire avec exactitude,
ce que représentent les autres partis qui gravitent autour du chef de
l’Etat. Néanmoins, pas un seul instant je n’ai regretté d’avoir rejoint
la mouvance présidentielle et je vais révéler pour la première fois, que
je n’avais pas eu la considération et l’amitié que Wade m’a témoignées
comme on dit en basket, dans mon deuxième quart temps politique. Avec le
parti socialiste, véritablement j’étais mis à l’étroit, j’y ai connu en
même temps que mes amis les pires privations, brimades et vexations.
C’est pourquoi aussi, je n’ai pas de prix pour les marques d’affection
que le président a manifestées à mon endroit. C’est la raison qui fait
que, nonobstant les difficultés, je continuerai toujours à le soutenir
et œuvrer pour sa réélection en 2012.
Le Messager : Vous aviez présidé les assises de Foundiougne 1
dans le cadre du règlement de la crise Casamançaise, avant que
Foundiougne 2 ne soit hypothéqué par le décès du prélat Abbé Diamacoune
Senghor. Avec la diversité des interlocuteurs actuellement, pensez-vous
que les acquis seront maintenus ?
Me Mbaye Jacques Diop : Je reste convaincu que la paix définitive
est toujours dans l’ordre du possible au niveau de la région sud du
Sénégal. Je trouve qu’il vaut mieux négocier avec plusieurs pôles, que
de le faire avec un seul pôle, pour s’éviter un dénouement de crise plus
ou moins fragile. Lorsque je gérais ce dossier, j’ai eu à échanger avec
les différents animateurs des ailes du MFDC. J’avoue que je les connais
tous, à part Salif Sadio, que j’étais à deux doigts de rencontrer.
Toutefois, il reste un de mes proches collaborateurs avec son cousin
Kaoussou Sadio. Comme aimait à le dire Senghor, on ne négocie pas sur la
place publique, mais je crois qu’il faut faire confiance au président
de la République. C’est vrai que le processus entamé depuis 2000 a été
long, mais il ne faut jamais perdre de vue que ce problème ne connaîtra
pas son épilogue en quelques jours, ni en quelques mois. Aujourd’hui
beaucoup de paramètres me confortent dans mes convictions que la paix
est à portée de main. En tout cas, je tiens à réitérer ma confiance au
président Wade et lui dire que je suis à sa disposition pour continuer à
lui apporter ma disponibilité et mon expérience. Je sais bien ce qu’il
fait et la bonne manière avec laquelle il le fait. Comme personne n’est
de trop pour rechercher des solutions de sortie de crise, je serai
toujours prêt à lui apporter mon concours dans ce sens. Encore qu’il
m’arrive jusqu’à présent, de prendre langue ou de recevoir chez moi
quelques protagonistes dans le plus grand secret, pour soutenir le
président de la République dans cette mission hautement importante. Mais
sachez que l’on ne peut pas tout dire…
Le Messager : En tant que président du comité ad hoc de la
célébration de la décennie de l’alternance, qu’aviez-vous fait pour
réussir le pari de la mobilisation ?
Me Mbaye Jacques Diop : N’oubliez pas mon parcours politique en ma
qualité de secrétaire à l’organisation et à la propagande des jeunes du
BPS et de l’UPS. J’ai été également maire de ville pendant dix neuf
ans. Donc toutes ces stations politiques m’ont permis de savoir comment
on gère les gens, comment aussi on peut mobiliser. Mais je dois
souligner que j’ai été aidé dans cette tâche par le ministre Farba
Senghor, qui est un meneur, par Mamadou Diop Decroix et surtout
le Pr. Iba Der Thiam, qui sont tous des hommes de valeur,
déterminés à apporter leur soutien au président Wade. Chacun d’entre
nous y est allé à fond. C’est peut-être cette foi qui m’a animé avec
d’autres responsables de l’alliance « sopi pour toujours », que je ne
peux pas citer tous. Lesquels m’ont aidé et bien encouragé dans le
relèvement du défi de la mobilisation à l’occasion de la célébration de
l’an 10 de l’alternance.
Le Messager : Pensez-vous que le démarrage des opérations de
placement des cartes au PDS peut régler les querelles internes de
leadership ?
Me Mbaye Jacques Diop : Pour moi PDSL ou PDS, c’est toujours la
formation libérale du secrétaire général national Me Abdoulaye Wade. Je
me rappelle d’une contribution que j’avais faite dans la presse pour
dire qu’avant de changer de sigle ou d’appellation, ne faudrait-il pas
aller en congrès. Le président Wade m’avait fait l’honneur et l’amitié
de me recevoir dans son bureau pour discuter sur des sujets concernant
le PDS. Notamment sur, comment il voyait ses contours, son avenir et sur
les hommes et les femmes qui doivent l’animer. Moi qui étais habitué à
discuter avec Senghor, Mamadou Dia, Abdoulaye Ly entre autres grandes
figures politiques de notre pays, j’ai été intellectuellement séduit par
la façon dont le président Wade veut manager son parti. Mais encore une
fois, le PDS c’est son parti et dans les partis où j’ai milité et celui
que j’ai moi-même crée, il faut passer par de longues discussions pour
pouvoir arriver à un consensus. Au contraire, le PDS a la particularité
d’avoir son chef et j’ai eu l’occasion de lui dire amicalement que : «
le PDS n’est pas tellement démocratique ». En guise de réponse, il
m’avait rétorqué que si dans les statuts, on n’avait pas inscrit que son
secrétaire général national est le seul à être élu par le congrès, il y
a longtemps qu’on l’aurait débarqué. Je pense donc qu’il faut avoir
cette approche pour mieux comprendre Abdoulaye Wade et le fonctionnement
du PDS qui, certes a un secrétaire général national, mais qui est un
chef. C’est bizarre, mais cela n’empêche guère à cette formation de
s’adapter, alors que par son leadership, il parvient à faire fonctionner
tout cela dans un bouillonnement extraordinaire.
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