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Vendredi 01 Juin, 2018 +33
Politique

[ EDITORIAL ] Il faut mettre à la retraite le président Wade !

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[ EDITORIAL ] Il faut mettre à la retraite le président Wade !

Editorial :
Une atmosphère de fin de règne. A tout le moins, un navire sans gouvernail ou un avion sans pilote. C’est au choix. Toujours est-il que la cacophonie et le cafouillage qui se sont installés au plus haut niveau de l’Etat  ces derniers jours n’augurent rien de bon pour notre pays. Nommer un ministre pour le limoger quarante-huit heures après, en limoger un autre pour le réintégrer deux jours après en remplacement… de son remplaçant, chasser un autre ministre du gouvernement, le recevoir en audience et lui tendre un décret le nommant président du Conseil économique et social, une institution qui n’existe même pas encore juridiquement (et pour cause, puisque le Congrès réunissant l’Assemblée nationale et le Sénat n’a même pas encore statué sur la question !), limoger un ministre d’Etat à la présidence de la République et le rappeler quelques instants plus tard pour le rétablir dans ses fonctions, sortir un autre ministre du Gouvernement pour l’appeler à la Présidence avec le titre de ministre d’Etat, délester un ministre d’une partie de ses prérogatives et les lui rendre à l’issue d’une audience accordée moins de vingt-quatre heures après la formation du gouvernement… Le tout en quarante-huit heures d’intervalle ! La République a vacillé dans ses fondations, assurément, tandis que notre pays, tel un bateau ivre, vivait deux jours de folie. Et ce n’est sans doute pas fini. En fait jamais, dans l’histoire du Sénégal indépendant, on n’avait assisté à une telle comédie burlesque, à une telle pantalonnade, à un feuilleton aussi désopilant. Désopilant, burlesque ? Mais c’est de tristesse qu’il faudrait plutôt parler ! Une comédie ? Non sire, plutôt une tragédie ! Les institutions sont piétinées, malmenées, vidées de leur substance, massacrées par la personne qui incarne la première, la plus prestigieuse et la plus puissante d’entre elles, le président de la République, seul bénéficiaire de la légitimité populaire qui l’a porté à  la tête de notre pays pour cinq longues années. Et qui, en tant que tel, devrait être le garant du respect des institutions.

Incarnation de la Nation, devant veiller au respect de la Constitution — ne dit-on pas de manière triviale qu’il en est le « gardien » ? —, le président de la République en est malheureusement arrivé à considérer le Texte fondamental comme un chiffon dont on ne compte plus les rapiéçages et les rafistolages. Combien de fois la Constitution qu’il a fait adopter à son arrivée au pouvoir a-t-elle été révisée ?

En fait, il ne se passe pas un trimestre sans que le Président pose un acte allant dans le sens d’une fragilisation des institutions, de leur « guignolisation », de leur aplatissement face au seul pouvoir qui vaille pour lui dans ce pays : le sien propre, tous les autres devant être assujettis — contre privilèges mirobolants tout de même — à l’accomplissement de sa volonté de puissance. En fait, il pourrait  s’exclamer « l’Etat, c’est moi ! », encore qu’il s’agissait pour l’auteur de cette phrase d’un Etat solide, éclairé et qui reposait sur des principes clairs et sur des bases juridiques qui n’étaient pas à géométrie variable. Or, le problème au Sénégal sous Wade, c’est qu’on se demande encore s’il y a un Etat et si nous vivons encore en République. Les exemples foisonnent d’actes qui discréditent les institutions à l’image de ces pétitions et lois taillées sur mesure pour faire partir un président de l’Assemblée nationale, jadis deuxième personnage de l’Etat, de ce Sénat dont les deux tiers des membres sont nommés par le président de la République et qui prime pourtant sur l’Assemblée nationale dans l’ordonnancement institutionnel du pays, de ce foisonnement de ministres d’Etat au point où l’on a l’impression d’avoir affaire à l’Armée mexicaine avec son inflation de généraux, de ces ministères aux appellations pittoresques et saugrenues… Mais il y a surtout, surtout, ce tripatouillage de la Charte fondamentale par des tailleurs spécialistes du sur-mesure constitutionnel, la dernière coupe à la mode devant être  figurer dans la collection haute couture du printemps 2009 étant la  robe vice-présidence. Burlesque et kafkaïen dans un pays qui a déjà un Premier ministre, même s’il n’est pas sûr que cette dernière fonction ne sera pas supprimée à la faveur des innombrables retouches de la Constitution et des multiples lubies du président de la République. Lequel ne semble décidément pas démordre de l’idée fixe qui le taraude : se faire remplacer à la magistrature suprême par son propre fils. Par tous les moyens. Toujours est-il qu’en introduisant une vice-présidence dans son architecture institutionnelle, le Sénégal s’aligne sur le cas unique jusque-là — et cocasse — du Gabon où il y a effectivement un Premier ministre et un vice-président, le fils du président de la République étant le ministre de la Défense (auparavant, un autre de la fratrie — de la portée, devrait-on dire ! — Bongo, ayant occupé les fonctions de ministre des Affaires étrangères). Décidément, le président Abdoulaye Wade nous a fait tomber bien bas sur le plan démocratique (sur les autres plans aussi, d’ailleurs, à part quelques exceptions).

Pour en revenir à la dernière pantalonnade en date, l’accouchement non pas douloureux mais désopilant du gouvernement de M. Souleymane Ndéné Ndiaye, force est de constater que la coupe est pleine. A force d’avaler des couleuvres, les Sénégalais n’en peuvent plus de se contorsionner. Des ministres limogés qu’un coup de fil maraboutique fait remettre en selle, ou qu’une audience avec le Président réhabilite voire promeut à des responsabilités plus éminentes encore, le peu qui restait encore de prestige à la République fout le camp. Mais n’a-t-on pas vu des partisans d’un ministre déchu déchirer le drapeau national, ce qui a eu pour effet… de faire revenir le ministre en question au gouvernement.

Nous qui avons une certaine idée de la République, que nous idéalisons, que nous chérissons et que nous avions tendance à vénérer, ces coups de poignards qui lui sont portés nous apparaissent comme criminels. Il est en tout cas inacceptable de voir la Constitution, les institutions et les lois de la République malmenées à ce point. De notre point de vue, un ministre c’est un  citoyen investi d’une mission à durée déterminée. Au terme de cette mission, ou si l’Autorité qui l’a désigné estime qu’il y a des gens plus qualifiés ou plus dignes de confiance pour  continuer cette mission, le ministre doit être remercié et retourner à ses occupations antérieures ou migrer vers telle autre fonction que cette même autorité souhaitera lui confier. Or, voir des gens s’accrocher à leur fauteuil ministériel, grenouiller et ramper comme des vers devant des marabouts et quelques autres personnages influents pour rester à leur poste, cela veut dire qu’ils sont mus assurément par autre chose que la volonté de servir la Nation. La logique ne voudrait-elle pas dès lors qu’ils soient remerciés ? Or voilà qu’ils prétendent être ministres professionnels, c’est-à-dire à vie alors même que, encore une fois, leur fonction devrait être tout ce qu’il y a de passager. Il y a donc quelque chose de pourri dans le système, qu’il faudrait changer.

Le cafouillage de ces derniers jours au sommet de l’Etat rappelle un triste épisode de l’histoire d’un pays maghrébin qui s’est ressaisi depuis : celui des derniers jours au pouvoir du  président Habib Bourguiba. Le Combattant suprême aussi avait multiplié les décisions incohérentes à la tête de l’Etat tunisien et était d’ailleurs sur le point d’instaurer une… vice-présidence (tiens, tiens !), une fonction qui, selon toute vraisemblance, allait être confiée à son épouse, Wassila. La ressemblance avec la situation que nous vivons présentement est d’autant plus frappante que la Tunisie de l’époque disposait aussi d’un Premier ministre. L’acte de trop commis par Bourguiba, nous dit-on, c’est lorsqu’il a signé un décret pour nommer ministre un de ses collaborateurs… décédé depuis longtemps. La suite, on la connaît, pas besoin d’en dire plus. Il reste à souhaiter que Wade ne connaisse pas la même (triste) fin de règne que Bokassa, pardon Bourguiba car il faut savoir partir avant qu’il ne soit trop tard !

                                            LE TEMOIN



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