Les rencontres multilatérales au sein de l'opposition n'ont pas pour objectif la mise sur pied d'une large alliance et, par conséquent, d'une liste commune qui regroupera le maximum de partis. La préoccupation y est plutôt tournée vers certaines exigences qui, selon certains de ses membres, sont obligatoires pour la participation de celle-ci aux élections législatives du 3 juin prochain. Dans la correspondance épistolaire qu'ils ont adressée au chef de l'Etat, le Parti socialiste, les partis membres de la coalition Alternative 2007 sous la houlette de l'Afp, la Ld/Mpt et la coalition And liggey Senegal d'Idrissa Seck ont dressé la liste de ces préalables. Il s'agit, entre autres, de ‘la remise à plat et à fond du fichier électoral, la transparence et la sécurisation du vote des militaires et paramilitaires, le plafonnement et le contrôle des dépenses électorales et la création, selon un mode consensuel, d'une structure chargée de l'organisation des élections’.
Ces partis fondent leurs exigences sur le fait que le scrutin présidentiel du 25 février dernier n'a pas été transparent, sans pouvoir en apporter la preuve jusqu'ici. Les requêtes introduites auprès du Conseil constitutionnel par le Ps et la Ld/Mpt ont été rejetées, avec des arguments à l'appui, par cette juridiction. Malgré tout, l'opposition poursuit le débat et subordonne sa participation aux élections législatives à la satisfaction de ses revendications cita supra. Mais, visiblement, elle ne semble pas avoir pris la pleine mesure de ces exigences. Les questions qu'elle a soulevées, appellent un examen de fond, donc du temps, de l'argent et des ressources humaines. Le paradoxe est, du reste, frappant pour une opposition qui demande ‘le plafonnement et le contrôle des dépenses électorales’, parce que celles-ci ne se limitent pas seulement au budget de campagne des partis. A deux mois des prochaines élections législatives prévues le 3 juin prochain, le temps semble trop court eu égard aux nombreuses questions soulevées par l'opposition.
Le temps et l'argent pourraient, peut-être, servir d'arguments au pouvoir pour rejeter les revendications de l'opposition. Mais, le gros récif sur lequel elle va buter est le président Wade. En effet, le chef de l'Etat n'est pas disposé à satisfaire les exigences de celle-ci. Invité de l'émission ‘Et si vous nous disiez toute la vérité’ sur Tv5, il a déclaré, en substance, qu'une Commission électorale nationale indépendante (Ceni) qui n'utilise pas l'argent de l'Etat, qui ne met pas à contribution l'administration territoriale n'existe nulle part dans le monde. A la réplique de l'animatrice de l'émission qui lui fait remarquer que la Ceni existe dans certains pays, Me Wade dira que ces commissions ne sont indépendantes que de non. Et de qualifier les opposants qui posent cette revendication de mauvais perdants, avant de les tourner en dérision en rappelant leurs scores. Pour étayer son argumentaire et justifier le triomphe du libéralisme, au-delà de sa victoire, à l'élection présidentielle, il fait remarquer que son suivant immédiat n'est personne d'autre que son ancien Premier ministre, quelqu'un qu'il a lui-même formé. ‘Il (Idrissa Seck : Ndlr) ne peut pas s'opposer à moi’, dira-t-il fièrement. Le score d'Ousmane Tanor Dieng, arrivé troisième avec un peu plus de 13 %, Me Wade n'en parlera que du bout des lèvres pour montrer qu'il est insignifiant à ses yeux.
A la lumière des propos du chef de l'Etat, il est clair que l'opposition n'aura pas gain de cause pour sa revendication pour une Ceni. Pas plus qu'elle ne sera satisfaite sur les autres points de sa plate-forme. On a souvenance de la sortie du coordonnateur de la Cap 21 qui avait déclaré, sans ambages, qu'il n'y aura pas un nouvel audit du fichier électoral. ‘Si l'opposition veut boycotter, c'est son affaire’, avait prévenu le Pr Iba Der Thiam.
Face à la réticence du pouvoir, l'opposition ira-t-elle jusqu'au bout de sa logique, en traduisant en acte sa menace de boycott ? Amath Dansokho parle de boycott actif. Mais, le boycott actif dans la pensée de Marx, cela signifie une insurrection. Heureusement que le leader du Pit qui n'ignore pas l'acception de ce terme a vite fait de préciser que ‘nous (l'opposition : Ndlr) ne voulons de pas de guerre civile’.
Quoi qu'il en soit, ce serait une erreur historique que de laisser l'Assemblée nationale seule entre les mains du Pds et de ses alliés face, peut-être, à Aj/Pads (si Me Wade refuse la main tendue de Landing Savané pour une alliance) et de quelques petits partis (par la taille électorale, pardi) qui accepteraient de servir de caution. Malheureusement, et au grand dam de la démocratie sénégalaise, c'est ce à quoi on risque d'assister, car l'opposition semble s'être engouffrée dans une impasse et qu'elle ne va plus reculer pour ne pas donner l'air d'avoir prêté le flanc.
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