DECRYPTAGE - L’agenda de Idrissa Seck ôte le sommeil au Pds : Le Bleu a peur de l’Orange

Persona non grata en Casamance. Menace de réactivation du dossier judiciaire ou d’invalidation d’une candidature. Revendication du bilan de l’alternance. Accusation de vol, non établie par la justice. Evacuation hier par les gendarmes de la salle du Cices devant accueillir Idrissa Seck, à l’occasion du congrès d’un parti membre de la Cap 21. Ce ne sont là quelques joyeusetés politiques commises par le Pds en réponse à son ex-n° 2.

Qu’on l’eût reconnu ou nié, la vérité qui brille comme le soleil et dont les rayons ne se laissent pas décidément contempler par les responsables du Pds est que le retour de Idrissa Seck au Sénégal et ses diverses prises de contact avec certains segments de la société sénégalaise ont imprimé une bouffée d’animation à une scène politico-préélectorale, jusque-là assez monotone.

Depuis lors, on assiste à une sorte d’incroyable peur bleue qui s’est emparée des responsables libéraux. Des libéraux qui ont adopté une posture réactive face aux actes que pose l’ex-Premier ministre. Les proches du Président Wade, à quelques exceptions près, se sont cloîtrés dans une sorte d’exil intérieur, comme s’ils avaient été ankylosés pour certains, séduits pour d’autres (chut, les murs ont des oreilles !) par la témérité de leur ex-frère. Ce dernier, on a beau vouloir le nier, occupe quand même le terrain politico-électoral obligeant du coup ses épigones enflammés hier, devenus ses farouches contempteurs aujourd’hui, qui s’abîment à donner des gages à Me Wade. Aussi assiste-t-on à des sauts de cabris sur un terrain politique dévasté côté pouvoir par le chienlit qui s’est installé depuis quelques mois au Sénégal. Depuis lors, le Pds ne cesse de poser des actes en guise de riposte, qui placent objectivement Idrissa Seck en véritable alter ego de Me Wade. L’ex-Premier ministre et actuel leader de Rewmi ne pouvait rêver d’un meilleur scénario. En fonctionnant sur un mode pauvre qui consiste à cibler géométriquement le maire de Thiès, en y allant parfois de péremptoires déclarations du genre persona non grata et autres marquages à la culotte, les responsables libéraux ont illustré, à l’envi, la panique bleue qu’ils broient face aux effets politiques dévastateurs de leur nouvelle tête de turc.

Face aux discours d’Idrissa Seck qui a dressé un tableau bien sombre de l’alternance qu’avons-nous donc entendu ? De mornes esquifs de sentiments outrés ou prétendus tels, des invectives peu ragoûtantes, sur l’exigence pour l’ex-Pm d’assumer sa part de responsabilité. En oubliant au passage l’aspect principal de la contradiction principale.

Les libéraux, pourfendeurs de leur désormais ex-frère, auraient pourtant été plus inspirés, eux qui défendent contre vents et marées que le bilan de Me Wade est nickel, de montrer et de démontrer le non-sens des arguments brandis par Idrissa Seck. Or, en s’abritant derrière une argutie de ce genre aussi légère que le poids d’un duvet, il y a comme une reconnaissance tacite de quelques laideurs ayant entaché les réalisations présidentielles.

DERISOIRES RACCOURCIS

Le plus burlesque dans la communication bien gauche, c’est de se confiner dans une attitude qui se résume à exhiber la menace d’une réactivation du dossier judiciaire, comme raccourci électoral pour éliminer un adversaire politique. L’insoutenable légèreté consiste ici à déserter les foyers des débats fructueux, enrichissants en opposant au bilan de Idrissa Seck et à l’esquisse de son programme de redressement national des arguments convaincants au lieu des esquives faciles qui convoquent les accusations qu’aucun dossier judiciaire n’a jusque-là assis de manière formelle. En réalité, au Pds, mis à part le Président Wade lui-même à qui il faut reconnaître une intelligence politique, c’est le désert en termes d’hommes politiques ayant des idées et du tempérament. Or, ainsi que le disait François Bazin, «en politique, dès lors qu’on a des idées et du tempérament, rien n’est jamais fini».

Depuis le retour de Idrissa Seck et sa visite en Casamance, toujours sporadiquement secouée par les crépitements de kalachnikovs, la vérité est que le Pds tressaillit de peur face un homme qui ose enfin, sur le champ politique jusqu’ici vide, risquer sa carrière pour ses idées, de tout miser pour ses ambitions et qui joue ses convictions comme il abat ses cartes. Un peu dans le genre de ce que Laurent Joffrin disait à propos de Chevènement.

L’attitude politique cohérente à adopter vis-à-vis de l’ancien directeur de campagne et Premier ministre du Président Wade avant que l’alternance n’entame sa phase descendante, il y a quelques mois avec les effets manifestes d’une crise économique, énergétique et sociale ne saurait se limiter en ballet de phraséologies creuses, dans les labyrinthes de velléités aux senteurs xénophobes, régionalistes et dans des tentatives de manipulation de l’appareil judiciaire.

En réduisant sa défense face à Idrissa Seck, à ses discours, à ses critiques et aux actes qu’il pose et dans lesquels s’invitent les responsables libéraux, le Pds se fige dans une radicalité désopilante, comme forme inefficace de catharsis…politique pour parer à l’effet psychologique dévastateur de défections dans les rangs libéraux comme celles du député Mama Dabo, du 3e secrétaire adjoint de la fédération communale de Ziguinchor, Cheikh Diémé et depuis hier le décrochage de la Cap 21 (mouvance présidentielle) du Front populaire pour la justice de Insa Sangharé. Les grandes lignes de fracture se dessinent dans un parti libéral en proie au doute, y compris au niveau de son capitaine redevenu, peut-être par le miracle de l’irruption de Idrissa Seck sur la scène électorale, candidat à la candidature.