En élargissant l'assiette des crédits alloués aux fonds politiques, le président de la République, Me Abdoulaye Wade, a-t-il foulé au pied les autorisations parlementaires ? Son ancien Premier ministre le croit, qui a affirmé devant la Commission d'instruction s'être limité à appliquer les instructions du chef de l'Etat quant à leur utilisation.
Les crédits alloués au chef de l'Etat et votés par l'Assemblée nationale à titre de fonds politiques, n'ont jamais dépassé 650 millions de francs Cfa. Mais, sous le régime issu de l'alternance du 19 mars 2000, la barre aura été placée largement au-dessus, au mépris de la loi. C'est du moins ce qu'Idrissa Seck a soutenu lors de son second passage, le 23 décembre dernier, devant la commission d'instruction de la Haute Cour de justice qui l'entendait sur le fond du dossier dit des chantiers de Thiès.
Selon l'ex-Premier ministre, beaucoup de milliards ont été reversés dans les comptes des fonds politiques sur instruction du président Abdoulaye Wade. Ces sommes qui provenaient de diverses sources, notamment les fonds diplomatiques, alimentaient la caisse noire du chef de l'Etat. La transaction, selon les révélations faites par Idrissa Seck devant les magistrats instructeurs, se faisait soit par des chèques signés du président de la République et visés par le ministre des Finances, soit par des remises d'espèces par Huchard (le fameux gendarme à la retraite qu'Idrissa Seck avait sorti de l'ombre dans l'un de ses Cd explosifs et qui était chargé de retirer des chèques à la banque pour le compte du chef de l'Etat) ou après lui par le chef du Service de l'administration générale et de l'équipement (Sage) de la présidence.
Ainsi, aurait déclaré l'ancien Premier ministre devant la commission d'instruction, entre mars 2000 et le 23 avril 2004, deux jours après son départ de la Primature, il a eu à gérer pour le compte du président de la République plusieurs dizaines de milliards de francs Cfa. Et d'ajouter, en réplique aux accusations de dépassement dont il est l'objet dans le cadre des chantiers de Thiès, que là, on peut parler de dépassement au regard des autorisations parlementaires. De là à affirmer que le chef de l'Etat a outrepassé ses prérogatives, il n'y a qu'un pas qu'Idrissa Seck franchit allègrement.
L'ancien homme fort du régime libéral ira même plus loin, en accusant quasiment le chef de l'Etat d'avoir planifié son acte. Idrissa Seck révèlera ainsi à la commission d'instruction qu'après sa prise du pouvoir, le président Wade a introduit une nouveauté dans la gestion des fonds politiques en demandant à avoir des comptes à sa signature. Ce qui fut fait, dira l'ancien numéro deux du Pds aux magistrats instructeurs. A quoi tout cet argent a-t-il servi ?
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