Les agents du ministère de l’Intérieur ont fait un passage pour le moins mouvementé à Toulouse. D’après le consul général du Sénégal à Bordeaux, Momar Thiam, qui dirige cette mission, deux étudiants ont fortement perturbé le processus électoral. «Opération préméditée»? Le consul s’interroge et livre ici sa version des faits.
Toulouse a accueilli, à partir de vendredi dernier, la mission des agents du ministère de l’Intérieur, chargée de procéder à l’inscription des Sénégalais sur les listes électorales et dirigée par le consul général du Sénégal à Bordeaux, Momar Thiam. Selon ce dernier, le foyer Sonacotra de la ville rose a été le théâtre d’un étrange spectacle : une altercation entre le consul et deux étudiants sénégalais, Ousmane Diop et Cheikh Sène, à propos d’inscription sur les listes électorales. Momar Thiam donne sa version en déroulant le film de l’incident. Désireux de préparer au mieux l’inscription des Sénégalais sur les listes électorales, Momar Thiam envoie «un courrier officiel aux associations sénégalaises, qui devaient relayer l’information». Les destinataires de ce message sont Ousmane Diop, président de l’Association des étudiants et stagiaires sénégalais de Toulouse et Moustapha Thiam, président de l’Association des travailleurs sénégalais de Toulouse. Dans cette missive, précise M. Thiam, sont indiqués «les documents nécessaires pour s’inscrire : une carte d’identité originale et un extrait d’acte de naissance daté de moins d’un an». Et d’ajouter : «Le travail se passait très bien. Ousmane Diop est arrivé à 10 heures avec une photocopie de son extrait d’acte de naissance.» Conformément aux instructions de la Cena, «on a refusé de l’inscrire, car ce document n’était pas valable». «Il est alors venu me voir. Je lui ai dit qu’en tant que président de l’Association des étudiants et stagiaires sénégalais de Toulouse, il devait être le premier à s’inscrire et à montrer le bon exemple, en se dotant des documents originaux et non de photocopies», raconte le consul. M.Thiam se rend compte, quand il revient dans la pièce où ont lieu les inscriptions, que la plupart des étudiants présents ont apporté leur passeport pour s’inscrire. «Ils ont reçu un mail d’Ousmane Diop. C’est de la désinformation! Je lui ai dit que ce n’est pas bien d’envoyer une mauvaise information, d’induire les gens en erreur.» L’étudiant quitte alors la salle et revient «une heure et demie après, avec un autre extrait d’acte de naissance daté de 2002». Nouveau refus. «J’ai l’impression que quelque chose ne va pas chez vous», s’étonne Momar Thiam. Ousmane Diop indique alors au consul qu’il va faire le nécessaire pour qu’on lui envoie les bons documents de Dakar.
«Il y avait du monde et je discutais quand est arrivé un soi-disant étudiant, dénommé Cheikh Sène, avec son passeport et une photocopie», poursuit le consul. Son inscription étant également refusée, Cheikh Sène «a commencé à taper du poing sur la table, à menacer l’agent. Il criait : « Si je ne suis pas inscrit, personne ne sera inscrit !». On est sorti de la salle pour parler et ne pas déranger les inscriptions», raconte M. Thiam. Lors de la discussion, le consul lui rappelle les instructions de la Cena et le prévient : «Vous ne pouvez pas menacer un agent de l’administration.» «Pour l’image du Sénégal, je n’avais pas envie qu’il y ait du boucan et qu’on dérange le voisinage», ajoute M. Thiam. Cette conversation ne semble pas changer grand chose dans le comportement de Cheikh Sène qui, une fois «reparti dans la salle, a continué à crier sur l’agent, puis a été rejoint par Ousmane Diop».
Les inscriptions prennent alors une toute autre tournure. Momar Thiam rapporte encore : «Ils ont barricadé l’entrée avec trois tables et des chaises, débranché l’ordinateur et l’appareil photo, éteint la lumière, se sont emparés des formulaires d’inscription et se sont assis dessus.» «Ce que je déplore, c’est que personne n’ait rien fait pour les empêcher», ajoute M. Thiam. Ce dernier qui dit «assurer la sécurité de l’équipe, qui est sous (sa) responsabilité, la sauvegarde du matériel et la sécurité des Sénégalais présents», appelle la police municipale. Une fois sur place, deux agents des forces de l’ordre «ont dégagé une table et sont entrés. Ils ont essayé de les raisonner. En vain». Ousmane Diop et Cheikh Sène indiquent, selon le consul, que «les mesures prises par l’administration sénégalaise sont nulles et non avenues». «Ils sont venus prendre en otage les gens venus s’inscrire et empêcher un fonctionnaire en exercice de faire sa mission. C’est une vendetta. Ils voulaient faire en sorte que ce soit un fiasco. (...) J’ai l’impression que c’était une opération préméditée», dénonce le consul. «En débranchant l’ordinateur, j’ai peur que les 550 inscriptions faites à Bordeaux aient été supprimées. Je ne suis pas sûr que le fichier ait été sauvegardé», ajoute-t-il. Momar Thiam fait alors appel à la police nationale. Ousmane Diop et Cheikh Sène «ont fait un boucan pas possible. Ils ont insulté tout le monde», raconte-t-il. Il récuse toute violence physique. Les deux étudiants ont été alors interpellés et placés en garde à vue ; le consul se rend au commissariat pour porter plainte.
Le lendemain, «la première chose à faire était de retirer ma plainte, par simple esprit d’humanisme et de protection des Sénégalais de ma juridiction, même si Toulouse dépend de la juridiction de Paris. Ils ont été libérés dans l’après-midi», raconte Momar Thiam. «Un agent de police, qui a été insulté pendant l’interpellation, voulait porter plainte. C’est moi qui l’en ai dissuadé», ajoute le consul.
Après cet incident, «l’accès principal a été fermé et l’entrée se fait par groupe de deux» ; 350 personnes viennent s’inscrire. «Le samedi soir, des membres du bureau de l’Association des étudiants et stagiaires sénégalais de Toulouse, dont leur secrétaire général, sont venus me demander de retirer ma plainte», déclare M. Thiam. Dimanche, «Ousmane Diop est venu s’inscrire, muni d’un extrait d’acte de naissance original», conclut le consul.
Des rires. Telle est la réaction de Momar Thiam face aux propos de Ousmane Diop et de Cheikh Sène, indiquant que le consul leur avait demandé de s’organiser de façon à ce qu’il y ait moins d’inscrits et de militer au Pds. «Je suis diplomate ; j’ai un droit de réserve. J’ai été conseiller en communication à la Présidence de la République et chargée de la communication lors des élections de 2000. Jamais je n’ai été dans un parti ou une organisation politique. Je ne fais pas de politique», précise M. Thiam. Avant de conclure : «Je leur laisse la responsabilité de leurs propos. S’ils vont plus loin, s’ils continuent à raconter n’importe quoi, je ne suis pas sûr de ne pas porter plainte. C’est de la diffamation !»
0 Commentaires
Participer à la Discussion