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CHEIKH GUEYE ALIAS SANEKH : Le « destresseur » public

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CHEIKH GUEYE ALIAS SANEKH : Le « destresseur » public

Cheikhou Guèye alias Sanekh veut faire rire les Sénégalais afin qu’ils soient tous contents. Son désir est de les déstresser et non de leur administrer des leçons de morale. L’artiste déplore toutefois le manque de soutien dont souffrent ses pairs.

Une ambiance bon enfant règne au stand d’une entreprise de la place, à quelques jours de la clôture de la 18e édition de la Foire de Dakar. Au milieu des artistes qui sont sur scène, Cheikhou Guèye alias Sanekh se distingue par sa grande taille et sa silhouette de sahélien. Habillé en jean bleu, la casquette sur la tête, il attire l’attention des nombreux clients et des curieux venus assister aux derniers moments de la foire. « Je veux vous en donner mais je n’ai pas d’argent. J’ai tout donné avant d’arriver sur les lieux », répond Sanekh, l’air désolé, à une dame qui lui demande de l’argent lorsqu’il s’apprête à monter sur scène.

Après le spectacle, la sortie des lieux devient une équation à résoudre pour l’artiste. Il doit faire des détours pour éviter les regards indiscrets du public. Les artistes célèbres sans véhicules ne marchandent pas le prix de la course de taxi. Ce taxi, il faut le héler très vite et s’y engouffrer avant de procéder au marchandage. Venu le rencontrer à 16 heures, ce n’est que vers 20 heures que nous avons pu nous s’entretenir avec l’artiste.

« C’est mon destin », répond-il à la question de savoir ses débuts dans le théâtre. « Personne ne maîtrise son devenir. L’homme propose, Dieu dispose », dit-il, dans un style comique. Il espérait devenir un grand basketteur vue sa taille. Sanekh a atterri finalement dans la comédie à la suite d’un accident qui l’a obligé à mettre fin à ses rêves de sportif. La maison familiale était le siège du groupe théâtral « Ndoumbélane de Thiès ». Son grand frère en était membre. Il assistait presque à toutes les répétitions et prestations.

« Un jour, il y avait un acteur qui manquait lors d’une présentation. J’étais là pour suivre le spectacle. Les membres du groupe m’ont demandé de venir jouer avec eux », déclare-t-il, un brin nostalgique.

Les thèmes dans les pièces théâtrales de l’artiste sont divers et variés. « Je ne suis pas là pour donner des leçons de morale, pour rectifier les gens ou bien pour les éduquer », soutient Sanekh. « Nous avons opté pour un théâtre de divertissement et d’instruction sans offenser quiconque », ajoute l’artiste. Le fort de l’artiste reste son inspiration rapide et efficace. Celle-ci lui permet de s’adapter à tous les cadres et à toutes les circonstances. Il n’a point besoin de répéter pour certains spectacles. « Cela me vient comme ça. Ça dépend du milieu et du cadre où je me retrouve et de la nature du thème », soutient M. Guèye.

« Je n’ai jamais utilisé de gros mots. Je ne suis pas vulgaire. Je ne serais jamais vulgaire », répond l’artiste, s’adressant manifestement sur un ton sévère à ceux qui le traitent de trivial. Le problème, selon lui, c’est qu’il utilise des mots qu’une frange de la population sénégalaise ne connaît pas. « Nous sommes des Sénégalais mais nous ne comprenons guère nos langues locales », souligne-t-il, l’air étonné. On préfère : « you know, tu sais » au détriment des expressions tirées de nos langues.

A l’en croire, dans le Baol (centre du Sénégal), on dit jamais « ki le jur » mais « ki le fothi ». Car, dit-il, « ce sont les animaux qui mettent bas ». « Je n’ai jamais insulté. Je n’ai jamais été vulgaire. Ce n’est pas de mon rôle d’être vulgaire », renchérit-il.

« L’art ne nourrit pas son homme, du moins au Sénégal », déclare Sanekh avec amertume. Il est convaincu que les artistes sont victimes de leur célébrité. A son avis, c’est la passion qui les pousse à continuer à jouer du théâtre. Sanekh constate, pour s’en désoler, que le gouvernement ne prend pas également en charge les artistes. « Il ne les aide guère. C’est difficile d’être artiste au Sénégal », remarque-t-il. L’air fatigué, après plus de deux heures sur différents podiums, Sanekh dénonce, avec énergie, la piraterie dont les artistes sont victimes : « il s’agit d’un vol ; ceux qui procèdent à ces actes n’ont pas de cœur. Ils le font sans scrupule et sans gêne ».

Concernant la vie de la troupe théâtrale, il dit toucher du bois. « Ça marche comme sur des roulettes. C’est nickel », ajoute-t-il. Celui-ci indique qu’il ne faut, en aucun moment, considérer l’absence d’un membre du groupe, à l’occasion d’une production, comme une scission. Il souligne : « il faut qu’il y ait des acteurs principaux et secondaires ». Selon Sanekh, le fait que tout le monde se retrouve dans une production ne relève pas du professionnalisme. Actuellement, ils ont décidé de ne réaliser que quatre produits par an. Et cela, dit-il, « pour permettre à chacun de mener ses activités quotidiennes ». Par rapport aux supputations relatives à un éclatement de leur groupe, « le soleil levant », il répond : « que ceux qui le croient continuent à le penser et attendent à ce que « Le soleil levant » se casse. Nous travaillons. C’est l’essentiel ».

Le monde de l’art est complexe. On y rencontre toutes les catégories socioprofessionnelles. Sanekh, en se déplaçant, est obligé de raser les murs tout en étant gentil avec certains fan et en faisant la sourde oreille aux railleries. « Parfois, vous rencontrez des gens qui vous abordent bien et avec respect et modération. D’autres, en revanche, vous offensent. Ils sont impolis. Ils ne respectent pas les artistes et ne savent même pas comment les aborder. Ils font du n’importe quoi », regrette-t-il.

Tout de même, Cheikh Guèye garde de bons rapports avec le monde artistique. Ses amis artistes le qualifient de « généreux ». Abdoulaye Thiam, 12e gaïndé (supporter de l’équipe nationale de football), affirme que l’artiste a un « bon cœur ». « C’est un artiste complet. Il est bien éduqué. Il est ouvert », témoigne-t-il. Abdoulaye Guèye, batteur de « tama » (tambour d’aisselle), un de ses compagnons, se dit fier de l’artiste et de ses prestations. Il soutient que Sanekh sait jouer du théâtre contrairement à ce que certains soutiennent : « il fait du bon boulot pour l’art sénégalais ». Son camarade, Bara Diagne, fait le même témoignage : « il est généreux. Nos relations ne sont pas basées sur l’argent ».

A ces compliments, il répond modestement : « je n’ai aucun problème avec qui que soit ». Cependant, certains artistes déplorent la constance du rôle de l’artiste dans son incarnation perpétuelle du personnage de Sanekh dans presque toutes les pièces théâtrales qu’il a jouées. C’est le cas d’Abdoul Kader Diarra alias Kader, artiste-humoriste. Il soutient que l’auteur d’« hopotolow tolow low » doit changer de style et de rôle dans ses prestations. Réplique de Sanekh : « je n’ai jamais été fixe dans les rôles. J’incarne différents personnages. Je change mes attitudes et mes thèmes. » Selon lui, chaque artiste doit avoir sa spécialité et son fort : « je suis bon en comédie. Je la joue sans difficulté. » Sanekh ambitionne d’intégrer le monde du cinéma mais il compte attendre le moment opportun pour le faire : « je laisse cela entre les mains de Dieu ». Il n’entend pas mener d’autres activités qui risquent de l’éloigner de son art. « Je suis artiste et je le demeure. J’aime le Sénégal. J’aime le développement du pays. J’aime tout le monde. Je veux faire rire tout le monde afin que tous soient contents », souligne-t-il.

Ceux qui attendent l’artiste sur le terrain politique doivent déchanter. La politique ne l’intéresse pas du tout. Sanekh futur maire de Thiès ? Il répond : « je ne ferais jamais de la politique ». Toutefois, il entretient, avoue-t-il, de bonnes relations avec les hommes politiques. « J’ai beaucoup d’amis dans le gouvernement qui m’aiment très bien. Cela ne signifie pas que je fais la politique ». On lui a reproché d’avoir fait, dans une des ses productions, les louanges de l’ancien maire de Thiès, Idrissa Seck. Sanekh répond : « je n’ai pas chanté ses louanges. J’ai salué ses réalisations ». Il poursuit : « c’est ce boulot là à Thiès que j’ai chanté. Je ne suis pas là à chanter Idrissa Seck. Je ne suis pas griot ».

Cheikh Guèye est marié mais il préfère taire le nombre de ses bouts de bois de Dieu (enfants). Il n’aime pas qu’on aborde ce qu’il considère comme étant sa vie privée. Toutefois, il accepte volontiers évoquer ses préférences et ses goûts. Sanekh écoute tous les genres musicaux. Mais ce qu’il aime par-dessus tout c’est la paix. Normal, cet artiste, adepte de la comédie, veut du bien à tout le monde.



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