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Polémique autour de la Fao : Les vérités de Jacques Diouf à Me Wade

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Polémique autour de la Fao : Les vérités de Jacques Diouf à Me Wade
Ceux qui croient que le feuilleton Wade/Fao est rangé aux oubliettes avec la dernière sortie du chef de l’Etat sur les ondes de Radio France Internationale (Rfi), se trompent. En tout cas, dans un communiqué intitulé ‘Le directeur de la Fao répond aux critiques du président du Sénégal’ et sorti jeudi soir, Jacques Diouf a tenu à réagir sur les différentes sorties du président de la République à propos de son institution. Et point par point, des réponses considérées comme étant ‘objectives’ par l’institution onusienne sont apportées. Voilà, dans le désordre, les arguments présentés par le directeur général de la Fao pour démanteler ceux de Wade.

‘La Fao est un gouffre d’argent’

L’institution spécialisée des Nations unies dans l’agriculture et l’alimentation tient à préciser que ‘le budget (biennium) de la Fao est adopté par la Conférence de l’ensemble des Etats membres’. Cette précision faite, Jacques Diouf signale que ce même budget ‘est équivalent, à titre d’exemple, à celui du ministère de l’Agriculture de l’Afrique du Sud. Les différents pays contribuent en fonction du barème des Nations Unies (la part du Sénégal est ainsi de 0,004 % du total)’. Avant d’ajouter qu’il ‘sert à mettre en œuvre le programme de travail de l’Organisation’ après avoir été ‘approuvé après examen par les comités des finances et du programme’. Il présente de manière ‘détaillée tous les postes budgétaires en personnel, équipement et fonctionnement’. Et ‘les comptes font régulièrement l’objet d’un audit. Ils ont toujours été approuvés pour chaque exercice biennal’. Selon le communiqué, ‘entre 1994/95 et 2006/07, les ressources de la Fao ont baissé en termes réels de 22 % et le personnel de la Fao a diminué de 24,6 %, bien que le nombre des Etats membres de l’organisation soit passé de 169 à 191 durant la même période’. Une manière pour Jacques Diouf de balayer d’un revers de la main l’accusation du président Wade pour qui la Fao est un gouffre à milliards avec son personnel pléthorique.

‘Je leur (aux responsables de la Fao) ai dit que si vous continuez…, je vais vous traduire devant la justice, il faut rembourser les 20 % de l’argent collecté en notre nom’

Selon la Fao, ‘ces propos (du président de la République) se passent de tout commentaire’. Et de rappeler que ‘la Fao est une organisation des Nations Unies dont les modalités de gestion collective intergouvernementale sont définies et protégées par un ensemble de traités internationaux garantissant son indépendance et son immunité par rapport aux interventions unilatérales des Etats’ et ‘le Sénégal a ratifié ces traités et s’est engagé à respecter le statut de l’organisation’, rappelle le communiqué de Jacques Diouf. Ce qui veut dire qu’une éventuelle plainte du chef de Etat est voué à l’échec. Le communiqué informe que ‘le système des Nations Unies, les activités des agences, fonds et programmes sont complémentaires et le secrétaire général en assure la coordination’. C’est ainsi ‘qu’en 2005 et 2006, un Groupe d’experts de haut niveau sur la cohérence du système des Nations Unies, présidé par les Premiers ministres de Norvège, du Pakistan et du Mozambique, a étudié avec sérieux le fonctionnement de l’Onu et présenté un rapport avec des propositions pour que le système agisse encore plus efficacement sur le terrain dans une plus grande unité. Les ambassadeurs et représentants permanents des 192 pays membres de l’Onu discutent à l’Assemblée générale, de manière méthodique, les mesures proposées tant au niveau global que national. La Fao, naturellement, a été associée à cet exercice et y participe pleinement, notamment dans le cadre des huit projets pilote sur le terrain’. Ce qui laisse sous-entendre que Wade serait en retard dans sa proposition de réformer la Fao et de porter plainte contre elle.

‘La nourriture aux pauvres, c’est de l’aumône…’

Là également, l’institution dirigée par Jacques Diouf n’est pas d’accord avec le chef de l’Etat sénégalais. ‘Est-ce que la Fao distribue de la nourriture ? Quelles sont les institutions bilatérales, régionales et multilatérales qui font ce travail ?’, s’interroge Jacques Diouf. Qui précise que ‘l’assistance technique à l’agriculture, c’est l’assistance à des hommes et femmes debout. L’assistance technique, c’est justement le travail que fait la Fao’. Mais par ’des actions de formation sur le terrain, notamment avec le Programme de coopération technique (Pct) et le concours de la coopération sud-sud (1 473 experts mis à la disposition des pays en développement)’, explique le communiqué. Il y a également ‘le renforcement des services vétérinaires (lutte contre la fièvre aphteuse, la fièvre de la Vallée du Rift, la peste porcine africaine, la péripneumonie contagieuse bovine, la grippe aviaire, la maladie de Newcastle, la peste des petits ruminants, la fièvre catharrale ovine, etc.) et des services phytosanitaires (renforcement des capacités de détection et de traitement contre le criquet pèlerin, la rouille noire du blé, etc.)’. Jacques Diouf fait comprendre que son organisation s’investit dans ‘le recours à la lutte biologique intégrée, avec pour résultat une diminution de 50 % des quantités de pesticides avec une augmentation de 15 % de la production de riz, (dans) la vulgarisation des pompes à main et à pédale, la construction de canaux d’irrigation, de petits barrages, de silos métalliques de stockage, etc.’. Ce n’est pas tout puisque la Fao mène ‘des projets de production de riz, de maïs, de manioc, de cultures maraîchères, d’aviculture, d’élevage ovin et caprin, etc., sans oublier l’introduction de microjardins et le développement de l’aquaculture’. La liste n’est pas exhaustive.

‘C’est l’institution Fao qui doit être mise en cause. La situation actuelle est largement son échec’.

Jacques Diouf rejette cette accusation du président de la République. Selon lui, ‘les spécialistes de l’agriculture, les économistes et journalistes du monde qui ont analysé les causes de la crise alimentaire ont identifié les facteurs (…)’. La Fao explique que la production agricole a été affectée par le changement climatique, dont les corollaires sont ‘inondations, sécheresses, hivers plus rigoureux, typhons, ouragans, tremblements de terre, etc.’. ‘Ensuite, les stocks de céréales sont à leur plus bas niveau depuis 1980’, rappelle-t-elle. Avant de s’interroger : ‘Est-ce que la Fao a un territoire national avec des terres arables et des citoyens, dont des agriculteurs, pour produire des denrées alimentaires ? Est-ce qu’elle détient des stocks de produits alimentaires ?’.

L’autre facteur qui explique la crise, c’est la croissance démographique mondiale. C’est ainsi que la population va passer de ‘6 milliards actuellement à 9 milliards en 2050’. ‘La Fao peut-elle être rendue responsable de la naissance de 78,5 millions d’enfants supplémentaires chaque année ? (...) Est-ce que c’est la Fao qui décide des politiques incitatives de subventions et de protection tarifaire pour développer les bioénergies au niveau national ?’. D’autres argument ont été brandis par le directeur général de la Fao telles les subventions à l’agriculture des pays développés qui ont atteint ‘372 milliards de dollars en 2006’. ‘Est-ce que c’est la Fao qui négocie et applique les décisions dans les relations commerciales internationales ? De plus, les politiques agricoles des pays en développement ont été libéralisées et leurs structures d’appui au monde rural (vulgarisation, fourniture d’intrants, stockage et commercialisation, crédit, stabilisation des prix) ont été progressivement éliminées et ont laissé leurs petits agriculteurs sans défense face aux forces du marché international. Est-ce que c’est la Fao qui a fait pression sur les pays en développement pour l’adoption de telles politiques ?’, s’interroge encore Jacques Diouf.

‘L’hivernage arrive à grands pas dans le Sahel, fin mai - début juin. Sa durée moyenne est de trois mois. Saisissons cette opportunité qui ne se présentera plus que dans un an’.

Pour cet argumentaire de Wade, la Fao dégage ses responsabilités. Car ‘dès le 17 décembre 2007, dans une conférence de presse à Rome, la Fao a attiré l’attention de la communauté internationale sur la nécessité de donner la priorité à la campagne agricole 2008, et a lancé une ‘Initiative pour lutter contre la flambée des prix des denrées alimentaires’’. C’est dans ce cadre que le Directeur général de la Fao dit avoir annoncé ‘la contribution de 17 millions de dollars Eu de la Fao à cette initiative bien qu’elle ne soit pas une institution financière (…) et lancé un appel pour que 1,7 milliard de dollars soient mobilisés’. Et ‘ces ressources financières ou en nature, conformément aux règles de l’aide au développement, passent par les canaux bilatéraux ou multilatéraux dans le cadre d’accords spécifiques avec chaque gouvernement’. Alors, ‘il est donc inexact de dire que la Fao, à son tour, a annoncé qu’elle avait besoin de 1,7 milliard de dollars’, dément le communiqué. Qui ajoute que cet appel de la Fao a été approuvé par l’ensemble du système des Nations Unies et des Institutions de Brettons Wood au cours de la réunion qui s’est tenue à Berne en Suisse, du 28 au 29 avril dernier. Il figure dans le communiqué présenté le 29 avril à la presse internationale par le secrétaire général de l’Onu. Mieux, ‘au Sénégal, en décembre 2007, avec les partenaires au développement, en présence des ministres de l’Agriculture, de l’Hydraulique, etc., le 22 décembre 2007 avec la presse, et ensuite le 17 mars 2008 avec les ministères techniques et économiques, le Directeur général de la Fao a tenu des réunions pour alerter les autorités nationales et l’opinion sur les risques de crise alimentaire et discuter des mesures à prendre pour présenter ce programme. Ces réunions ont été largement couvertes par la presse nationale’. Alors, ‘pourquoi les actions appropriées n’ont pas été lancées à ce moment là ?’, se demande Jacques Diouf.

‘Le chemin est donc tout tracé pour la communauté internationale qui veut réellement aider, celui de l’investissement innovant dans le domaine de l’agriculture en Afrique’

Jacques Diouf souligne que, depuis son premier mandant, il s’est engagé dans ce sens en lançant des ‘Programmes spéciaux de sécurité alimentaire (Pssa) qui sont opérationnels dans plus de 100 pays’. Et la priorité est accordée ‘aux petits ouvrages de collecte d’eau et d’irrigation réalisés par les communautés rurales’. Dans le même cadre, selon l’institution onusienne, que des programmes nationaux comportant des mesures de politique agricole, de renforcement institutionnel et des programmes d’investissement (dans le cadre d’une approche village par village) ont été initiés dans 15 pays et sont en cours de formulation dans 36 autres pays. ‘Le Directeur général de la Fao répète depuis 14 ans que ‘la loterie agricole’ doit cesser (en Afrique 96 % des terres ont une agriculture pluviale alors que le continent n’utilise que 4 % de ses réserves en eau renouvelable). Il n’a cessé de répéter qu’il fallait investir prioritairement dans les ouvrages d’irrigation, dans les moyens de stockage et de conditionnement (les pertes après-récolte sont de 40 à 60 %), dans les routes rurales, les centres d’abattage, les ports de pêche, les chaînes de froid, etc. Ces éléments figurent dans le Programme détaillé de développement agricole (Pddaa) préparé en coopération avec la Fao et adopté au Sommet de l’Union africaine en juillet 2003. Les différents coûts ont été évalués pour faciliter leur financement’. C’est ainsi qu’à ‘la demande de gouvernements africains, la Fao a aussi apporté son assistance pour traduire le Pddaa en programmes nationaux dans 51 pays’.

Sans compter que ‘depuis 2001, la Fao aide plusieurs Organisations économiques régionales pour l'élaboration de programmes régionaux de sécurité alimentaire (Prsa)’. Et qu’en Afrique, ‘il s’agit des programmes régionaux de sécurité alimentaire de l’Uemoa (2002), la Cedeao (2002), la Sadc (2002, pas encore approuvé), la Comesa (2002), l’Uma (2001), l’Igad (2002), la Ceeac (préparé en 2003 et adopté en 2004), la Cemac (2003) et la Cen-Sad (en cours de formulation). Des programmes similaires ont été préparés pour d’autres régions du monde, à savoir pour les pays des Caraïbes (Caricom, 2002), les pays du Pacifique (Pif, 2002), l’Asie du Sud (Saarc, en cours de formulation), l’Asie Centrale (Eco, en cours de formulation) et l’Amérique du Sud (Mercosur, esquisse préparée en 2005)’. ‘Si, comme les faits l’ont établi, les investissements nécessaires n’ont pas été effectués, est-ce la Fao qui est responsable ?’, s’interroge-t-on du côté de l’institution spécialisée. Avant de faire suivre une autre interrogation : ‘Au Sommet des chefs d’Etat du G8 de 2001 à Gênes auquel le Directeur général a participé, ainsi qu’à l’Assemblée générale des Nations Unies, à l’Esococ, au Sommet extraordinaire de l’Union africaine sur l’eau et l’agriculture en 2004 à Syrte, la Fao n’a-t-elle pas aussi attiré l’attention des autorités mondiales sur cette situation et proposé des solutions ?’

‘Le Sénégal dispose d’intellectuels de valeur internationale’

La Fao rappelle que le Sénégal dispose d’intellectuels de valeur. ‘Certains sont partis à l’étranger et enseignent dans les plus grandes universités occidentales’. Alors, ‘la Fao est prête, si le gouvernement (du Sénégal) le souhaite, à travailler avec les experts qui sont dans les ministères techniques et économiques, à l’Institut sénégalais de recherches agricoles, à l’Université de Dakar et celle de Saint-Louis ainsi qu’à l’Académie des Sciences du Sénégal notamment, afin de réfléchir aux causes de la crise alimentaire mondiale, les solutions envisageables à court, moyen et long terme, les risques et les opportunités pour le Sénégal’. Le gouvernement pourrait ainsi bénéficier, selon l’institution onusienne, ‘de la réflexion approfondie de personnes compétentes et obtenir des analyses et conclusions pertinentes qui seraient les bases solides d’une action concertée pour assurer le développement agricole et la sécurité alimentaire du Sénégal’.

 



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