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Economie

Les autorités à cache-cache avec la mission du Fmi : Sénégalais, l'Etat n'a plus d'argent !

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Les autorités à cache-cache avec la mission du Fmi : Sénégalais, l'Etat n'a plus d'argent !

Chantage en vue sur la licence Tigo
Facture des appels téléphoniques : Environ 25 milliards par an
17 milliards par an pour les logements conventionnés

La mission du Fmi a permis de mettre à jour les mesures du désastre qui affecte les finances de l’Etat. A ce jour, faute de pouvoir justifier les dépenses effectuées depuis un certain temps, les membres du gouvernement se font tout petits devant les fonctionnaires du Fmi, et devant les représentants des bailleurs de fonds, qui demandent des mesures fortes, afin d’apporter leur concours. Pour s’y soustraire, l’Etat ne néglige aucun recours, même ceux qui s’apparenteraient à du chantage financier.

La mission du Fonds monétaire international (Fmi), actuellement à Dakar, met les autorités dans une position des plus inconfortables. Le nouveau ministre délégué, chargé du Budget, particulièrement, M. Mamadou Abdoulaye Dia, se sent particulièrement à l’étroit dans son bureau, par les temps qui courent. Il est obligé, face aux envoyés de Washington, de défendre une gestion budgétaire dont il n’a hérité qu’il y a quelques jours à peine, avant l’arrivée des visiteurs venus d’Amérique. Or, cette gestion nébuleuse s’avère indéfendable. Cela est si vrai que, depuis près d’une semaine qu’ils sont à Dakar, les membres de la mission du Fonds n’ont pas, jusqu’à hier, pu avoir de séance de travail avec le ministre du Budget et son personnel.
«Le ministère ne trouve aucun justificatif à leur présenter pour une très grande partie des dépenses, et c’est une situation très difficile», avouait en privé, hier, un fonctionnaire du ministère de l’Economie et des Finances. Très déprimé, le cadre indique qu’au sein de son département ministériel, règne depuis quelque temps déjà, et de manière palpable, la morosité et l’inquiétude du personnel, face au marasme économique ambiant, et surtout, face aux solutions durables pour sortir de la crise. Car les causes du trou du Trésor public sont bien profondes, et les bailleurs de fonds demandent plus que des mesures cosmétiques pour régler le problème.

Train de vie effréné
«On a tous peur. Ça va exploser !», confient en privé des hauts fonctionnaires du ministère de l’Economie et des Finances, qui ne cachent pas que, maintenant, les services tournent au ralenti. «Tout le monde attend. Car c’est sûr qu’il va se passer quelque chose ; les choses ne peuvent pas continuer comme cela», continuent ces membres de l’administration.
Leur inquiétude provient de l’ampleur des dégâts. Ainsi, les opérations de contrôle au sein de l’administration, ont révélé que rien que la facture de téléphone annuelle de l’Etat varie entre 10 et 12 milliards de francs Cfa, rien que pour les téléphones portables. «Si l’on ajoute les coûts des appels sur téléphone fixe, on comprend que le gouvernement ne profite pas de ses dividendes des actions de la Sonatel», commente un membre du ministère de l’Economie et des Finances. Qui explique que, pour la plupart de temps, l’Etat est obligé de faire de la compensation avec lesdites dividendes, pour couvrir ses dépenses en téléphone.
Autres frais aberrants que l’Etat a de la peine à justifier, les 17 milliards de francs Cfa annuels déboursés pour payer le loyer des logements conventionnés. «Or, nombreux sont les logements occupés par des ministres et des membres du gouvernement, en fonction ou démis, et qui n’y ont pas droit», soupire ce fonctionnaire désabusé.
Tous ces frais posent problème parce qu’ils montrent que les engagements de l’Etat de réduire ses frais de fonctionnement, n’ont pas porté les fruits attendus. Les montants cités plus haut ne concernent pas, par exemple, les frais de voyage de la haute administration, y compris du président de la République et de son proche entourage, qui n’utilisent plus l’avion de commandement, la «Pointe de Sangomar», lui préférant des appareils de location… Or, tout cela se fait alors que l’Etat ne parvient toujours pas à payer les dettes dues aux entreprises privées, dont le Fmi a, depuis longtemps, fait une des conditions essentielles de la poursuite de sa coopération avec le Sénégal.

De l’argent par tous les moyens
La crise alimentaire ayant mis à nu les artifices longtemps utilisées par les différents ministres du Budget depuis 2004, le gouvernement a aujourd’hui, une seule priorité, celle de trouver de l’argent rapidement, et par tous les moyens. Le Quotidien a signalé il y a deux jours, les efforts de l’Etat de se renflouer sur le marché financier régional et international, ainsi qu’auprès des banques nationales. Jusqu’à présent, la collecte n’a pas été très fructueuse, pour dire le moins. Selon des proches du chef de l’Etat, le président de la République avait demandé à l’homme d’affaires Serigne Mboup, président du holding Ccbm, de démarcher des personnes morales ou physiques qui prêteraient de l’argent à l’Etat. Or, affirme la même source, M. Mboup a opposé une fin de non recevoir à cette requête, affirmant que l’Etat devait déjà beaucoup d’argent aux privés nationaux.
Un moment, l’espoir a semblé luire du côté de l’une des grandes banques de la place. L’un de leurs dirigeants, occupant de très hautes fonctions dans l’organigramme international de cette structure, a affirmé pouvoir aider l’Etat à trouver, auprès des banques américaines, les 150 milliards de francs Cfa nécessaires au paiement de la dette des entreprises nationales. Cependant, plusieurs de ses collègues banquiers ne cachent pas leur scepticisme face à cette affirmation. Ils font remarquer que les banques américaines elles-mêmes, en ce qui les concerne, sont frappées par une terrible crise, qui a conduit à la faillite de certaines d’entre elles, dont Lehman Brothers est la dernière. Elles pourraient difficilement, dans ces conditions, venir au secours d’autres personnes.
Mais, plus important encore, font remarquer ces banquiers, le Sénégal n’a pas assez de crédibilité pour convaincre des banquiers américains, lui qui n’a pas pu trouver 100 milliards de francs sur le marché obligataire de la sous-région ouest-africaine. La piste des banques leur semble donc être une voie sans issue. D’où la volonté, de plus en plus exprimée au plus haut niveau, de recours à des artifices internes qui ressemblent à du chantage.

Con ou Sin Tigo ?
Des proches du pouvoir assurent que l’opérateur de téléphonie mobile Sentel va encore être mis à contribution, pour trouver de l’argent. L’Etat aurait l’intention, déclarent ces gens, de remettre «à plat», sa licence, comme en 2001, aux premiers mois de l’Alternance, quand le pouvoir de Me Wade avait voulu arracher cette licence, sous prétexte qu’elle n’avait pas été accordée dans la transparence. Les mêmes personnes ajoutent que les autorités assureraient déjà qu’en cas de refus de l’opérateur, la licence serait tout simplement retirée de force, et mise sur le marché. Bref, si Millicom ne veut pas céder à ce qui semble être une opération de chantage annoncé, le marché téléphonique sénégalais va peut-être évoluer Sin (Ndlr : sans en espagnol) Tigo… Néanmoins, que cette opération réussisse ou échoue, ce ne serait que retarder l’échéance. La seule solution à long terme, serait de conclure un programme avec décaissement avec les bailleurs de fonds, assurent les observateurs avertis. Mais, même dans ce cas, il y a des préalables, et pour l’Etat, ils sont des plus humiliants.

Les fourches caudines
La communauté des bailleurs du Sénégal ne passe plus une semaine sans se retrouver, pour parler de la situation du pays. Et elle inquiète tous les partenaires. Toutefois, au-delà des mesures à prendre pour redresser la situation, les bailleurs de fonds attendent du Sénégal qu’il montre des signes forts de vouloir vraiment redresser la situation. C’est ce discours qui a été tenu hier par l’Ambassadeur de France au Conseiller spécial du chef de l’Etat, M. Karim Wade.
Les bailleurs de fonds voudraient par exemple que le gouvernement, au plus haut niveau, fasse une annonce publique, par conférence de presse par exemple, sur la gravité de la situation du pays. «Ils faut qu’ils apprennent à dire la vérité aux citoyens, et lui disent que l’heure est à l’effort et aux sacrifices», indique un diplomate. Il considère, et indique que c’est l’avis de tous les représentants des bailleurs de fonds au Sénégal, que c’est là la meilleure preuve de l’Etat de vouloir vraiment changer de mode de gestion. «La manière dont on a pu creuser le déficit du Trésor à ce niveau, en esquivant tous les moyens de contrôle, n’incite pas à une confiance aveugle», explique le diplomate. Mais tous sont conscients que le gouvernement ne semble pas prendre le chemin d’une remise en cause de cette ampleur. Et ils sont curieux de voir comment les fonctionnaires du Budget vont trouver de l’argent, à une période où les dépenses de l’Etat ne sont plus couvertes par ses recettes.

RESPONSABILITE - Le ministre du Budget déjà menacé : Pour qui sonne le glas
La situation économique du pays, en plus de mettre en lumière la gestion informelle qui est faite des recettes de l’Etat, interpelle fortement la responsabilité d’un groupe de personnes qui ont en charge les deniers publics. Ibrahima Sar, désigné à la vindicte populaire comme le principal responsable de la banqueroute financière de l’Etat, n’a en fait été que l’agneau du sacrifice, malgré toute l’ingéniosité dont il a pu faire montre pour camoufler ses exploits dans les décaissements des avances sur trésorerie. Car les supérieurs hiérarchiques de M. Sar devraient aussi rendre compte. Et le premier d’entre tous, le ministre d’Etat chargé de l’Economie et des Finances.
M. Abdoulaye Diop a été souvent protégé par la carapace de confiance dont l’ont longtemps entourée les bailleurs de fonds, qui ne cessent de louer sa compétence et sa rigueur. Et lui-même, en privé, ne se prive jamais de critiquer les ministres du Budget qui se sont succédé avant M. Mamadou Abdoulaye Sow. Autant Cheikh Hadjibou Soumaré que Ibrahima Sar ont toujours été présentés dans l’immeuble Peytavin comme les complaisants qui ont toujours accepté de faire des entorses à la rigueur budgétaire, pour servir des ministres «dépasseurs». Mais cet argument est aujourd’hui jugé trop léger par les spécialistes des finances publiques.
Ils considèrent que le ministre des Finances aurait dû exercer toute son autorité pour arrêter les dérives, s’il en était informé. Et s’il n’en avait pas été informé, il est encore plus fautif, parce que cela signifie qu’il était laxiste dans la gestion de son département. Quoi qu’il en soit, le trou du trésor ne peut le laisser indemne, à ce niveau.
On ne reviendra pas ici sur les doubles responsabilités de l’actuel Premier ministre. D’abord en tant que chef du gouvernement, qui ne pouvait ignorer ce que faisait son ancien directeur de cabinet au Budget. Et ensuite, et surtout, comme initiateur de ces pratiques, lors de son long passage à ce même département. M. Soumaré devait savoir qu’un jour ou l’autre, la bulle allait éclater, et que le roi allait se retrouver nu. S’il y avait un sens de la dignité au pouvoir, les deux protagonistes devaient présenter leur démission, au lieu de chercher à sacrifier le nouveau ministre du Budget.

Le nouveau bouc emissaire
Car Mamadou Abdoulaye Sow ne semble pas faire l’affaire de beaucoup de gens. Choisi par Abdoulaye Diop dans l’urgence, il est tombé dans une situation dont il n’a pas été directement responsable, et dont il n’imaginait sans doute pas l’ampleur. Peu disposé à défendre ce bilan, il passe ces derniers jours, comme nous l’avons dit, à «jouer à cache-cache» avec la mission du Fmi.
Et il semble que cette situation énerve plusieurs de ses collègues, comme ses supérieurs. De plus, M. Sow aurait le tort d’avoir été très proche de l’ancien Premier ministre, Mamadou Lamine Loum. Les proches du Président Wade se demandent s’il a vraiment coupé tous les liens avec celui qui ne cache pas son opposition avec le régime. Dans l’incertitude, ils souhaiteraient tout simplement s’en débarrasser, d’autant plus que M. Sow ne fait pas preuve de «la même compréhension que son prédécesseur», envers certaines sollicitations.

La part de Segura
Mais cette interrogation pousse à se demander la part de responsabilité du représentant-résident du Fmi à Dakar dans la situation actuelle. M. Segura a été de ceux qui ont défendu avec conviction le ministre de l’Economie et des Finances, jusque dans les colonnes du journal Le Quotidien. Or, la faillite de la gestion étant collective, il devrait prendre sa part. Il a très certainement été hypnotisé par les façons de faire et les discours du ministre des Finances, au point d’oublier d’être attentif aux bilans portés dans les livres des comptes. Cela ne devrait pas être sans conséquence pour lui, non plus.



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