CONFLIT - Les industriels boudent la production : Dix mille tonnes de tomate à l’encan

Du fait de la concurrence que lui crée le nouvel industriel, qui produit à partir du triple concentré, la Socas a mis la pression sur les paysans. Ces derniers ne sont plus sûrs de la pérennisation de la filière, telle qu’elle a vécu depuis des décennies. Les responsables de l’entreprise ont expliqué à leurs partenaires qu’ils ont actuellement un stock de 12 000 tonnes de concentré, issues de la trituration de la tomate de la deuxième campagne et qui cherche preneur. Pour l’écoulement total de cette production, l’usine prévoit fin Juin 2007. Dans cette perspective, elle a avisé le comité tomate qu’elle s’engage pour la campagne 2006-2007, à n’acheter que 35 000 tonnes de tomate fraîche. Face à cette situation, les producteurs ont décidé de ne pas cultiver la tomate pour la campagne agricole qui va s’ouvrir. D’autant plus qu’ils ont eu d’énormes difficultés pour se débarrasser de 10 000 tonnes de surproduction.

Ils expliquent que leur client traditionnel, la Socas, n’avait pas voulu prendre cette production en charge. Et Ibrahima Fédior explique : «Nous avons beaucoup négocié avec la Socas et les producteurs. Mais nous avons buté sur l’intransigeance de Agroline qui est revenu sur ce qu’elle nous avait dit au début de la campagne, quand elle avait promis d’acheter 10 000 tonnes de tomate fraîche aux paysans de la vallée. C’était lors des négociations tenues en octobre-novembre. Mais au moment de passer à l’action, Agroline s’est rétractée pour nous dire qu’elle peut acheter mais ne peut pas faire de contrat avec les producteurs. Nous avons rétorqué que nous voulions une production garantie, dès lors, il fallait un contrat de culture. Elle n’a pas accepté de signer le contrat de production et s’est retirée du système et a poursuivi ses importations.» A la suite de ce développement, la Socas a indiqué aux producteurs qu’elle ne pouvait plus acheter toute la production et de ce fait, a freiné l’enthousiasme des producteurs.

Ce manque à gagner est une perte au niveau des paysans comme de l’Etat. Pis considère Ibrahima Fédior, les menaces sur la production mettent en péril la survie de 12 000 producteurs et hypothèquent l’avenir de toute production agricole dans la vallée. «L’importation massive et incontrôlée du double concentré, le développement exponentiel de la fraude le long de nos frontières et la concurrence industrielle déloyale sont trois causes qui interpellent l’Etat qui est garant de la liberté d’entreprise et du bon fonctionnement des règles économiques.»