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Culture

FILMS SENEGALAIS SELECTIONNES AU FESPACO : Tous financés par les fonds collectés à l’extérieur

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FILMS SENEGALAIS SELECTIONNES AU FESPACO : Tous financés par les fonds collectés à l’extérieur

Les cinéastes sénégalais sélectionnés à la 23e édition du Festival panafricain du cinéma et de l’audiovisuel de Ouagadougou (Fespaco) ont dû se tourner vers la France ou faire une autoproduction pour la fabrication de leurs films faute d’appui local.  L’Etat du Sénégal a brillé par son absence dans le plan de financement.  

 

Aucun des films sénégalais sélectionnés à la 23e édition du Festival panafricain du cinéma et de l’audiovisuel de Ouagadougou (Fespaco) n’a bénéficié de fonds de l’Etat sénégalais. Que ce soit Tey (Aujourd’hui) de Alain Gomis, La Pirogue de Moussa Touré, Président Dia de Ousmane William Mbaye, Yoolé, le sacrifice de Moussa Sène Absa et Accusé de réception de Djibril Saliou Ndiaye.  Selon les cinéastes et producteurs interrogés, ces réalisations existent  grâce à des fonds propres ou de l’argent collecté à l’extérieur.  Le ministère sénégalais de la Culture par le biais de la direction de la cinématographie s’enorgueillit du nombre de films retenus cette année (cinq pour la compétition officielle et six dans la section panorama et deux au marché du film).

 

Les deux fictions La Pirogue de Moussa Touré et Tey (Aujourd’hui) de Alain Gomis retenues dans la catégorie long métrage ont été financés grâce à une coproduction. Aucun sous de l’Etat sénégalais n’a permis la création de ces films primés à de nombreux festivals. Selon Oumar Sall, directeur de la société de production Cinékap basée à Dakar, coproducteur du film Tey, dont le budget non bouclé est évalué à 1,5 million d'Euros (environ 984 millions francs Cfa), l'équipe a dû faire avec les moyens de bord. Notamment les soutiens de la société de production Cinekap, Granit films et Maïa cinéma, du Centre national du cinéma français (Cnc) et du Fonds francophone audiovisuel du Sud. «Nous, au Sénégal, on devait apporter 320 mille Euros (environ 209 600 millions francs Cfa) qui correspond à nos 20 % et la France, par le biais du Cnc, Alain Gomis a eu une avance sur recette», indique Oumar Sall.  Dans le plan de financement du film, il y a aussi la Francophonie qui a donné 40 mille Euros (environ 26 millions de nos francs) et Tv5 Monde. Le Sénégal y a brillé par son absence. «Jusqu’au moment où je vous parle, je n’ai pas bénéficié même pas d’un billet d’avion pour représenter le Sénégal et l’Afrique dans les festivals pour ne pas parler de la fabrication du film», soutient Sall. Après plus de quarante cinq festivals et dix prix remportés, le film Tey attire les télévisions comme Canal+ absentes au début du projet.

 

Pour le film La Pirogue de Moussa Touré, c’est le même schéma financier qui a été mis en place faute d’appui local. Selon son producteur, le Français Eric Neve, joint par skype, la coproduction du film est assurée par les sociétés de production Astou films et La Chauve souris. La première s’est occupée de la partie tournée au Sénégal et le second, française, a assuré la post production. Sur un total de plus de deux millions d’Euros (environ un milliard trois cent francs Cfa) de budget, «la majeure partie du financement vient de la France». Le film a reçu une avance sur recette du Centre national du cinéma français d’un montant de cinq mille Euros ; d’un préachat de Canal+ à hauteur de 400 mille euros (262 millions de francs Cfa); de la chaîne Arte pour les droits télévisuels de trois cent euros  (196 500 millions F Cfa) ; de Tv5 pour cinquante mille euros (environ 32 millions), du fonds privé allemand de trente mille euros (19 millions) et d’investisseurs privés à hauteur de cent mille euros (65 millions). La Francophonie a participé au rayonnement du film et a soutenu sa participation au festival de Cannes en mai dernier. Le groupe français de téléphonie Orange y a participé ainsi que sa filiale sénégalaise pour les facilités d’appels.

 

Les deux documentaires Président Dia de Ousmane William Mbaye et Yoolé, le sacrifice de Moussa Sène Absa qui représentent le Sénégal à cette édition du Fespaco, existent grâce à des fonds personnels et étrangers. «C’est parce qu’il n’existe pas de fonds au Sénégal. J’ai écrit à la Sonatel qui n’a pas répondu. J’ai écrit à la Rts qui n’a jamais répondu. L’Institut national de l’audiovisuel (Ina) en France est coproducteur du film. On a eu accès à leurs archives. Des archives photos et audio privées comme celles de Roland Colin et de ma sœur. Il y a aussi la photothèque de la femme de Mamadou Dia, Oulimata Dia», fait savoir le cinéaste Ousmane William Mbaye lors d’un entretien. Son collègue Moussa Sène Absa a fait son film grâce à des fonds propres. «Yoolé est un film d’attaque, je ne pouvais pas demander au président Abdoulaye Wade de le financer, j’y ai mis mon argent à hauteur de 75 millions de francs Cfa», indique le réalisateur joint au téléphone. Aujourd’hui, il est optimiste et espèce que les choses vont changer. C’est d’ailleurs le même sentiment qui anime le producteur Eric Neve qui estime qu’avec le changement intervenu, l’espoir est permis.

 

Le seul film dans la compétition court métrage ne déroge pas à la règle. Selon Djibril Saliou Ndiaye, sa fiction Accusé de réception, existe grâce au fonds d’appui des initiatives culturelles privées de la mairie de Dakar pour un montant de 4 millions et un apport personnel de huit cent mille. La société La Poste lui a prêté son local. Mais aucune aide du ministère de la Culture n’a été donnée. Ces cinq films représentent le Sénégal à cette 23e édition du Fespaco qui s’ouvre samedi jusqu’au 2 mars prochain. Au total plus de 81 films sont en compétition dont 20 long métrages fictions, 20 courts métrages, 17 documentaires, 6 dans la section panorama, 18 pour la fiction vidéo et 8 pour les séries télévisuelles.

 

 

 

MOTS CROISES AVEC…  HUGUES DIAZ DIRECTEUR DE LA CINEMATOGRAPHIE : « Nos mécanismes de financements du cinéma et de la culture posent problème»

 

Le directeur du cinéma, Hugues Diaz aurait aimé voir sur le générique des films sénégalais à la 23e édition du Fespaco l’appui des institutions du Sénégal. Pour lui, il est temps que les pouvoirs publics mettent des moyens financiers pour le cinéma et l’audiovisuel.

 

Wal Fadjri : A jour J-1 de l’ouverture de la 23e édition du Fespaco, comment se prépare le Sénégal qui a cinq films en compétition ?

 

Hugues DIAZ : La  préparation se fait avec beaucoup de méthodes et d’organisation. Parce que cette année contrairement aux autres, nous voulons relever le défi de la participation sénégalaise. Nous avons mis en place un comité de pilotage depuis trois mois ouvert aux personnes ressources qu’ils soient publiques ou privées pour nous accompagner à cette 23e édition. Cette préparation est d’abord un appel à une mobilisation, de tous les professionnels du cinéma, (…) que nous acception le choix porté sur les dignes représentants du cinéma sénégalais. Nous avons cinq films en compétition officielle, six films dans la section panorama et deux au Marché du film Mica. C’est au moins une douzaine de films qui représenteront le Sénégal. La particularité, ce sont de jeunes talents qui vont présenter pour la première fois leur production, je veux parler de Djibril Saliou Ndiaye, Moly Kane, etc. (…) Sur le plan étatique, cette année, l’Etat n’a pas lésiné sur les moyens. Il a payé tous les billets des cinéastes sélectionnés. Nous avons réalisés 75 % de nos objectifs fixés avec un budget global de plus de trente millions. Nous allons accompagner les cinéastes dans la communication avec des supports, des affiches, des cartes postales pour chaque film. Il aura aussi un stand Sénégal au siège du Fespaco. Ce sera un lieu d’informations, d’échanges et de valorisation de notre cinéma. Le ministre de la Culture, Abdoul Aziz Mbaye est l’invité du gouvernement burkinabé.  Il y aura une journée du Sénégal prévue le mardi 26 février.


Les films sénégalais sélectionnés sont tous financés par des fonds extérieurs, comment analysez-vous  le fait que l’Etat sénégalais ne les ait pas soutenus depuis la création ?

 

C’est vrai, il faut le reconnaître, aujourd’hui nos mécanismes de financements du cinéma et de la culture de manière générale posent problème. En toute humilité, c’est de remarquer ce manquement. On aurait aimé voir sur le générique des films l’appui des institutions du Sénégal. L’appui à la production n’était pas fait, mais nous accompagnons ces films. L’Etat participe à la diffusion. C’est un appel du pied, il est temps que les pouvoirs publics, l’Etat, les collectivités locales puissent mettre davantage des moyens financiers pour le cinéma et l’audiovisuel sénégalais. Car ces films sont créés par le biais de l’autoproduction et voire de l’implication financière d’autres organismes internationaux autre que le Sénégal. Nous sommes en train de réfléchir sur les mécanismes endogènes, comment faire pour alimenter le fonds d’aide à la cinématographie, et d’autres moyens la révolution du numérique, il y a beaucoup d’enjeux.

 

Partagez-vous donc l’avis des professionnels qui disent qu’il était plus pertinent de soutenir en amont ces films ?

 

Oui Oui, lorsqu’on est dans une industrie culturelle, c’est toute une filière qu’il faut soutenir, de la formation à la diffusion exploitation en passant par la production. La raréfaction des moyens ne doit pas expliquer qu’un Etat se désengage de son cinéma. C’est plus qu’une nécessité de revoir la politique cinématographique du Sénégal. Nous sommes en phase, car il y a un engagement des professionnels, un cadre de concertation permanent pour la relance. L’Etat va créer ce cadre fiscal, économique et juridique pour que les acteurs du cinéma puissent s’épanouir.

 

Mesuriez-vous les chances du Sénégal de remporter l’Etalon du Yennega ?

 

Ce que je vois dans un festival, c’est l’aspect échange, voir que les films sénégalais vont être vus par un nombre important de personnes, c’est notre premier objectif. Nous avons espoir cette année que les films sénégalais vont bien se comporter. Les indicateurs sont là, tous ces films nous valent des consécrations au niveau international. Soyons prudent, allons avec modestie et humilité. C’est un rendez-vous où toutes les cultures se valent. Ce ne sera pas la finalité de notre participation. Le Fespaco comme on dit est la grand messe du cinéma africain, allons y pour recevoir surtout et donner aussi. Si l’Etalon nous revient, on ne va pas s’enflammer, mais ce sera une grande responsabilité. Nous avons besoin de ce cinéma fort, mais pas un 7e art de festival pour reconquérir les lettres de noblesses perdues.

 

Le thème du Fespaco est « Cinéma africain et politique publique». Le Sénégal a-t-il une politique cinématographique bien mise en place ?

 

Pas bien mise en place, nous sommes en train de l’avoir. Le Sénégal a des acquis, il faut les consolider. Nous n’allons pas réinventer la roue, il y a des modèles existants, nous allons les adopter. Le Maroc, la France et le Canada avec qui nous avons des accords de coopération, nous allons les côtoyer pour avoir un code cinématographie très digeste et surtout des mécanismes qui permettent aux acteurs de se mouvoir comme il se doit et  d’être indépendant.  La politique culturelle cinématographique doit être beaucoup plus dynamique et affirmée. Mais faudrait-il que les bases puissent être posées, à savoir les décrets d’application de la loi sur le droit d’auteur et les droits voisins, le statut de l’artiste, sa protection sociale, car nous sommes dépendant de cet environnement général qui doit être amélioré.

 

PAROLE AUX CINEASTES

 

MOUSSA TOURE, REALISATEUR DU FILM LA PIROGUE : «Je fais partie intégrante du Fespaco»

 

Sélectionné pour la quatrième fois, le réalisateur de Toubab Bi, Moussa Touré sera au Fespaco en tant que représentant de ce festival africain dont il s’en réclame. «Je fais partie du Fespaco, ce festival appartient à tous les Africains », dit-il. Pour lui, la manifestation du cinéma africain n’est pas seulement liée au Burkina Faso pays organisateur. Il se voit représentant du Fespaco, c’est pourquoi, affirme-t-il «j’avais proposé qu’il existe des pôle du Fespaco dans tous les pays du continent».

 

ALAINS GOMIS, REALISATEUR DU FILM TEY : «J’attends que mon film soit bien accepté»

 

Il est l’un des deux représentants du Sénégal dans la section long métrage fiction. Pour le réalisateur Alain Gomis qui revient après sa consécration en 2003, le Fespaco est une manifestation prestigieuse, la plus grande d’Afrique, la plus connu et représente beaucoup de choses pour lui. Il espère que son film sera bien accepté et que les gens auront la même lecture que le monde entier.

 

MOUSSA SENE ABSA, REALISATEUR DU FILM YOOLE, LE SACRIFICE : «C’est le côté grande retrouvaille que j’aime au Fespaco»

 

Le réalisateur du film Madame Brouette revient dans la sélection du Fespaco pour la septième fois avec son film Yoolé, le sacrifice. Le côté qu’il adore le plus au Fespaco, dit-il, «est ce rendez-vous de professionnels, entre collègues de pays différents, cette grande retrouvaille de la famille du cinéma».  Pour lui, cela permet de voir la nouvelle tendance, audace et esthétique, ce qui est à l’air du temps dans le 7e art. Il dit n’attendre rien de cette compétition après plusieurs participations sans prix, c’est surtout le côté rencontre qui l’intéresse.

 

DJIBRIL SALIOU NDIAYE, REALISATEUR DE ACCUSE DE RECEPTION : «J’espère avoir des partenaires »

 

C’est le bleue des cinéastes sélectionnés à cette 23e édition du Fespaco. Le plus jeune aussi. Djibril Saliou Ndiaye content de ce choix fait sur son film, espère trouver à Ouagadougou des partenaires disponibles, pour l’aider à avancer dans ce métier qu’il a choisi.

 

KHARDIATA POUYE, REALISATRICE DE CETTE COULEUR QUI DERANGE : «Je vais montrer mon film à un autre public»

 

Elle est sélectionnée pour la première fois et c’est dans la section panorama hors compétition avec son film Cette couleur qui dérange parlant de la dépigmentation. Pour Khardiata Pouye, c’est un plaisir et tout un honneur. «Je me dis que oui mon travail est reconnu et c’est l’essentiel», dit-elle. Le fait d’être hors compétition ne la dérange point. «Du tout ! Cette participation représente pour moi autre chose que le fait de concourir et de remporter un prix. Même si j’étais dans la compétition, l’essentiel pour moi est de participer ». Elle veut montrer son film à un public autre que Sénégalais, puisqu’il est destiné à toute femme et homme qui n’est pas fière de sa couleur noire.

 



2 Commentaires

  1. Auteur

    Xxl

    En Février, 2013 (10:24 AM)
    "Fabrication de film"?

    L'Etat!Tout est attendu de l'Etat!Pourtant l'Etat- Providence est révolu.En outre,l'artiste est indépendant,il exerce une activité libérale.Les fonds alloués ne sauraient ne sortir du néant.A Dakar,il n'existe plus de salle de cinéma.C'est un maillon manquant de la chaine et important au niveau économique.Ces rentrées d'argent pourraient aider à financer des réalisations.

    L'Etat crée le cadre et les conditions mais ne peut étre ni au début et à la fin de chaque entreprise individuelle.La rupture dans la mentalité d'assisté perpétuel ne ferait-elle pas avancer les choses?
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  2. Auteur

    Lxx

    En Février, 2013 (11:18 AM)
    Dans un pays où l'économie globale est extravertie,comment voulez-vous que le l'Etat prennent en charge les oeuvres artistiques,qui sont par définition le produit fini d'une entreprise individuelle et personnelle et libérale.

    La rupture doit se faire dans les mentalités et l'exploitation de salles de proximité aiderait au financement de fims?L'Etat intervient à un autre niveau pour accompagner comme il le fait actuellement.Les études ont été faites mais les moyens ne sont pas forcément disponibles.
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