Ce qui commence dans le mal
s’affermit par le mal
SHAKESPEARE
Ce n’est pas Ousmane Tanor Dieng qu’il faut plaindre, c’est le Parti socialiste. Et ce n’est pas le Parti socialiste qu’il faut accuser, mais Ousmane Tanor Dieng lui-même. De nombreux responsables socialistes sont consternés par l’aveuglement dans lequel se tient leur secrétaire général, pour faire tout ce que Laurent Gbagbo lui dicte de faire. Son parti-pris ne peut donc pas être celui du Ps, loin s’en faut. Il y a encore, dans le parti fondé par Léopold Sédar Senghor en 1948, des hommes dignes qui vivent l’épreuve de cette semaine comme une blessure et une humiliation. Jamais, dans son histoire, le Parti socialiste ne s’est trouvé aussi isolé. C’est principalement pour entrer à l’Internationale socialiste, qui imposait à ses membres une ouverture démocratique, qu’au début des années 70, l’Ups a initié un multipartisme certes limité à quatre courants, mais enviable dans un contexte africain marqué par les dictatures et les coups d’Etat. C’est bizarrement au nom de cette même Internationale qu’Ousmane Tanor Dieng soutient aujourd’hui le coup d’Etat de Laurent Gbagbo, en assumant le risque de s’isoler sur la scène internationale. Même le parti communiste chinois s’est gardé d’un tel affront. Il s’agit, à n’en pas douter, de la décision la plus grave qu’un chef d’un grand parti politique sénégalais ait prise depuis des décennies. Je pense surtout à ces hommes et femmes comme Abdoulaye Vilane, Barthélémy Dias, Khalifa Sall, Aîssata Tall Sall, Aminata Mbengue Ndiaye et aux sacrifices qu’ils ont consentis en restant loyaux à leur parti, quand partir était plus avantageux. Je veux leur dire qu’ils n’ont aucune raison de se sentir liés par un devoir de solidarité aveugle envers un homme qui ne leur manifeste aucun respect. Ousmane Tanor Dieng n’a pas sollicité l’avis du Ps, le Ps n’a aucune solidarité à lui exprimer en ces circonstances. S’ils sont encore des hommes attachés à la démocratie et à la légalité institutionnelle, ces socialistes ont maintenant l’occasion de le prouver, quitte à désavouer leur chef. Je les ai entendus plusieurs fois faire écho aux frustrations de leur leader, à chaque fois que le président Diouf s’est exprimé à contre-courant des opinions de son parti, en faisant les éloges d’Abdoulaye Wade. Il était donc mal indiqué, c’est le moins que l’on puisse dire, que celui qui lui a succédé à la tête du Ps se livrât à de telles fariboles. Mais l’homme est ainsi fait, si haut perché dans sa chaire que la moindre critique ne peut l’atteindre. Réunir les instances de son parti avant de rendre publique une position aussi grave lui semblait au dessus de ses moyens.
J’ai déclaré ici-même, que j’étais favorable à l’élection de Laurent Gbagbo. Je l’ai répété hier à ses « amis » qui ont voulu se faire son avocat. Son élection me paraissait plus convenable que celle d’Alassane Ouattara, soumis à Abdoulaye Wade et un à sirénien qui se fait passer pour le gendarme de la France en Afrique, Robert Bourgi. Mais je ne peux en aucune façon cautionner un double coup d’Etat constitutionnel et militaire. Quelles qu’aient été les aspirations du peuple ivoirien, elles doivent être scrupuleusement respectées. Les valeurs de liberté sont au-dessus de toutes les autres valeurs, et c’est à ce titre que nous devons respecter la liberté que se sont donnés les Ivoiriens de choisir celui qui les dirigera. Sur ce point, faut-il dire à Ousmane Tanor Dieng, les valeurs d’amitié entre partis politiques, si éphémères, ne peuvent pas être placées au-dessus de valeurs aussi fondamentales que celles de démocratie et de Droits de l’homme. C’est au nom de l’universalité de ces principes que je souhaite à tous les Ivoiriens la même chose que je souhaite à mon peuple. Nous avons envers ce pays et ses hommes un devoir de solidarité. Si nous laissons la forfaiture prospérer, nous n’aurons aucun moyen de nous opposer au coup d’Etat que nous prépare Abdoulaye Wade. Je sais qu’il est formel dans son soutien à Ouattara, mais il nourrit le vœu secret que le coup de Gbagbo passe et qu’il fasse jurisprudence. C’est pourquoi il faut saluer la détermination de la communauté internationale et surtout des instances sous-régionales africaines à faire partir le putschiste de Yopougon.
M. Dieng est un personnage sympathique. Il est même poli. Mais il y a des principes avec lesquels on ne peut transiger. Il a passé toute la décennie à se faire le chantre d’une nouvelle façon « républicaine » de s’opposer. Rien ne peut donc justifier sa décision de soutenir un putschiste.
Je disais qu’au lieu de plaindre Ousmane Tanor Dieng. Sa faute est incommensurable et elle porte en elle-même sa punition. Mais le Ps ne se remettra pas de son entêtement à vouloir maintenir à sa tête celui qui lui a fait tout perdre. Quand Abdou Diouf a voulu l’imposer à la tête du Ps, il a fait valoir « la confiance », contre les principes démocratiques les plus élémentaires. La notoriété d’Ousmane Dieng se limitait à quelques arpents dans son village de Nguégnène, mais son influence s’étendait à tout le Sénégal. Il trônait à la tête d’une administration qui lui obéissait au doigt et l’œil. A la tête d’une bande d’amis arbitrairement choisis, il a commencé ce que ses adversaires ont appelé « la refondation ». Toutes les têtes qui passaient étaient coupées, au nom de la loyauté au parti, et Abdou Diouf s’est laissé prendre à ce siège, refusant de scier la branche sur laquelle il était assis, mais qui provoquera sa chute. Djibo Kâ et sa bande ont été chassés, Moustapha Niasse exclu pour avoir rédigé une simple contribution sur l’état du pays.
Le parachutage d’Ousmane Tanor Dieng à la tête du Ps était lui-même un vice démocratique, et le Ps l’a payé quatre années après. Il a eu les coudées franches sur le choix des hommes, la main mise sur les fonds politiques qui nourrissaient ceux qui le vénéraient. Les maisons de la Sicap Sacré-cœur les mieux situées étaient réservées à ses amis journalistes et griots qui chantaient ses louanges. Ce qui m’a fait dire aux socialistes qui accusent injustement Djibo Kâ et Moustapha Niasse que le seul responsable de leur défaite en 2000 est Ousmane Tanor Dieng, qu’ils continuent de glorifier. Je me rappelle encore l’arrogance avec laquelle il encourageait Mbaye Diouf à faire du social et assurait de sa toute puissance, l’impunité de tous ceux qui rampaient à ses pieds. Les socialistes se vantent maintenant d’avoir chassé de leur parti tous les délinquants financiers qui y avaient pignon sur rue, mais ils oublient qu’ils ont gardé leur parrain à leur tête. Avec lui s’est répandu le phénomène de Cour, avec l’arrivée des ministres danseurs de Lambada. La désacralisation de l’Etat date en réalité de cette époque, et Abdoulaye Wade n’a rien inventé, de ce point de vue. On s’était même aventuré à façonner de jeunes à la fortune simultanée qu’on appelait les « tanorboys ». Quand la famille du président de la République s’est aperçue de ce phénomène peu courant, il était trop tard. Abdou Diouf était devenu psychologiquement dépendant de celui qui ne devait être que son collaborateur.
Ne serait-ce que parce qu’il a conduit toute cette politique arrogante et dirigé la campagne du candidat socialiste défait, il devait faire preuve d’un peu plus d’humilité.
Pour tout ce que je viens de dire, nous sommes fondés à nous poser la question de savoir ce qui serait advenu, si nous avions élu Ousmane Tanor Dieng à la tête de ce pays.Nous avions pensé que la pratique de l’opposition l’avait changé. Mais rien ne peut le faire bouger. Il est resté enveloppé dans sa cuirasse.
13 Commentaires
William
En Décembre, 2010 (07:14 AM)Mass
En Décembre, 2010 (10:31 AM)Sawaraak
En Décembre, 2010 (10:58 AM)Effet Placebo
En Décembre, 2010 (11:49 AM)Ah
En Décembre, 2010 (12:55 PM)ce qu'il est entrain de faire c'est de discrediter tanor dieng et dans le seul but de renforcer
la place de idy au sein de l'opposition
Jules est entrain de faire du surrenchere entre idy et mbacky et vous allez voir qu'il va se prononcer
pour le meilleur des deux au moment venu
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En Décembre, 2010 (15:17 PM)Bara Fall
En Décembre, 2010 (16:32 PM)Moi Même
En Décembre, 2010 (20:55 PM)Mass
En Décembre, 2010 (10:50 AM)Pytagor
En Décembre, 2010 (15:12 PM)Wax Deug
En Décembre, 2010 (15:34 PM)T Nul!
En Décembre, 2010 (21:39 PM)Espèce de GIROUETTE!!!!!
Dega Deuga
En Décembre, 2010 (03:25 AM)Participer à la Discussion